vendredi 30 mars 2012

Destouches avant Céline : le taylorisme et le sort de l'utopie hygiéniste (1988)

La mission Rockefeller, Rennes, 1918 (Céline est 2é en partant de la gauche)
Destouches avant Céline : le taylorisme et le sort de l'utopie hygiéniste.
(Une lecture des écrits médicaux des années vingt)
par Philippe ROUSSIN

Résumé
Philippe Roussin : Destouches avant Céline : le taylorisme et le sort de l'utopie hygiéniste (une lecture des écrits médicaux des années 20). L'article se propose de mettre en perspective les écrits hygiénistes de Louis-Ferdinand Destouches (1894-1961) contemporains des débats des années 20 sur le taylorisme et le fordisme. Il interroge quelques-unes des voies de pénétration en France des thèses nord-américaines en matière de rationalisation médicale. Celle-ci, contre la médecine libérale, est ici pensée à partir des «modèles» offerts par la rationalisation industrielle, lesquels conduisent à proposer des définitions de la santé et de la maladie essentiellement référées au monde de la production. L'article est également une contribution à la généalogie du discours social et utopique du romancier que devait devenir Destouches sous le pseudonyme de Céline.

Les écrits médicaux de L.-F. Céline (1894-1961) constituent l'objet spécifique de cette étude. Pour être précis, il convient d'ailleurs de ne parler que de Louis-Ferdinand Destouches, Céline étant, comme on le sait, le pseudonyme que l'écrivain s'est donné en 1932 lorsqu'il a fait paraître Voyage au bout de la nuit, son premier roman, tandis que les articles, mémoires, notes dont il est ici question ont été rédigés entre 1925 et 1933, au cours des années où Destouches poursuivait et comptait réussir une carrière d'hygiéniste (1). Cette précision appelle plusieurs remarques sur la méthode suivie et la définition du corpus. Littéraire par son origine disciplinaire, cette étude s'attache à des textes : leur interprétation nécessite leur mise en rapport et leur confrontation avec d'autres séries non textuelles, en particulier historiques, sans quoi ces produits de la conjoncture seraient difficilement intelligibles, mais leur lecture demeure l'objet dernier de l'analyse et l'unité du corpus corrige l'apparence de dispersion thématique : ce travail porte essentiellement sur les textes de médecine sociale (2).
Trois raisons sont responsables d'un tel choix. D'abord une unité certaine, au départ professionnelle, de la position énonciative. Ecrits dès 1925, dans le cadre du Bureau d'Hygiène de la Société des Nations à Genève, puis à partir de 1929, au titre de son activité de médecin consultant attaché au dispensaire municipal d'hygiène d'une commune populaire de la banlieue parisienne, ces textes, au nombre d'une vingtaine, par-delà la diversité des supports où ils paraissent, celle de leur objet (Ford et le service médical, la réforme de l'enseignement de l'hygiène, les assurances sociales, la médecine de dispensaire) ou de leurs destinataires, relèvent d'une même finalité, propre à l'entreprise de persuasion où se trouve alors explicitement engagé leur auteur pour le compte de la profession : rallier l'opinion médicale à la rationalisation, et doivent se lire relativement à la fonction de persuasion du discours par rapport à quoi ils s'organisent. C'est ce critère formel qui a fait ne pas traiter dans cette étude les textes postérieurs, de fiction ou polémiques, qui sont cependant solidaires des écrits médicaux par la place de signifiant central qu'ils réservent à la maladie ou la vision de la communauté qu'ils portent (et avec lesquels, en retour, ces écrits médicaux entretiennent une proximité due à leur dimension de projet utopiste ou de fiction) (3). Ensuite, produit de l'immédiat après-guerre, dans le climat des débats suscités par le taylorisme et le fordisme, ce corpus participe, par le biais de la propagande en faveur de la rationalisation médicale, de la littérature émanant des courants tournés vers les Etats-Unis et voués à l'apologie de la modernisation industrielle et sociale (la critique du régime libéral de la santé y est d'ailleurs conduite au nom d'une congruence entre rationalisation du travail et rationalisation de la médecine) ; en ce sens, ces textes peuvent être tenus pour un exemple des réceptions européennes du taylorisme et du fordisme dans l'ordre médical, avec les conséquences qu'introduit cette référence pour les choix ultérieurs, lorsqu'ils portent sur des solutions politiques extrêmes. Enfin, ils contiennent des informations suffisantes pour cerner l'intérêt qu'un sous-groupe de la profession médicale, tel celui des médecins de santé publique engagés dans la lutte contre les « fléaux » sociaux, lointains héritiers des hygiénistes du XIXe siècle, peut avoir à être associé à une telle entreprise en faveur de la modernisation, comme les formes de sa déception (pour Céline, ce seront l'entrée en littérature et le ressentiment pamphlétaire) lorsque ces alliances hors de la profession ne produisent pas les effets escomptés sur le déroulement de la carrière.
Avant d'aborder les modalités du soutien à la rationalisation, puis l 'influence du taylorisme sur les conceptions de la santé et de la maladie propres au médecin de santé publique que fut Destouches et de traiter des contours de l'utopie que dessine cet hygiénisme tardif de l'entre-deux-guerres, il convient de préciser quelques données relatives à son accession à la profession médicale, au déroulement de sa carrière, ainsi qu'à sa vision de la profession.

A Rockefeller medicine man
L'accès à la profession
La carrière de Céline a connu les effets de la position subalterne du segment de la profession médicale auquel il a appartenu en tant qu'hygiéniste et elle a épousé les principaux détours de l'histoire de la santé publique — les « lenteurs », en particulier, qui, dans la France de l'entre-deux-guerres, se font sentir dès que l'Etat, avec la paix, en revient, en matière de lutte contre les
« fléaux sociaux » (tuberculose, alcoolisme, syphilis), à son non interventionnisme d'avant le conflit. Pourtant, et quoi qu'il en soit de la vocation médicale et de son récit rétrospectif, ce n'est pas une fois devenu médecin que Louis-Ferdinand Destouches s'est orienté vers la lutte contre les « fléaux sociaux » ; ce sont, au contraire, imposées par la guerre, les nouvelles conditions de la mobilisation sociale contre ce type de maladies qui ont entièrement déterminé son accession à la profession médicale, dans les années où la recrudescence de la mortalité par tuberculose, entre 1916 et 1919, incitait la France à se doter, à l'exemple de l'Allemagne, d'un dispositif (prophylaxie, dispensaires d'hygiène sociale, sanatoriums) permettant d'endiguer la maladie [9] [15] [16]. C'est en 1918 que ce certifié de l'école primaire a été recruté, dans le cadre de sa croisade antituberculeuse, par la Mission Rockefeller qui, on le sait, met en oeuvre au titre de l'aide américaine, de 1918 à 1923, une politique de dépistage et de prévention de la maladie avec des moyens et des méthodes qui rompent avec le régime traditionnel de l'assistance (4). Intégré aux équipes mobiles cinématographique, il se fait conférencier populaire, parcourt les départements de l'Ouest avec la roulotte d'hygiène de la Mission, délivre plusieurs causeries journalières devant des publics scolaires et ruraux et participe aux campagnes d'information auprès des élites locales. L'expérience et le nouveau champ ouvert à l'intervention médicale, joints à l'abaissement momentané des barrières sociales consécutif au conflit et aux chances de mobilité sociale ainsi offertes (notamment par le biais des facilités accordées aux combattants de conduire un cursus universitaire en un temps réduit) expliquent qu'il puisse, après un mariage réussi, en 1924, devenir médecin, au terme d'une ascension sociale en d'autres circonstances impossible (5).
La trajectoire professionnelle épouse ensuite le sort des institutions qui, la paix revenue, succèdent à la Mission, les initiatives soutenues par la philanthropie nord-américaine en France et en Europe dans le cadre de l'aide à la reconstruction et le développement de l'appareil de santé publique français. En 1924, lorsque la mission américaine confie à un Comité national de défense contre la tuberculose le soin de poursuivre sa tâche, le nouveau médecin, deux semaines après la soutenance de sa thèse, rejoint, à Genève, la Section d'hygiène que vient de créer la Société des Nations, financièrement soutenue par la Fondation privée américaine (6).
De 1924 à 1927, il participe à la formation et aux échanges internationaux de personnels sanitaires mis en place par l'organisation internationale, alors en plein essor. En 1928, retour en France : après un stage de quelques mois à l'hôpital Laënnec dans le service de Léon Bernard (7), il devient médecin consultant attaché au nouveau dispensaire d'hygiène de Clichy, ouvert, comme nombre de ces établissements, dans la banlieue ouvrière parisienne, à la suite du vote de la loi sur les assurances sociales. Il le demeure jusqu'en 1937, date à laquelle la publication du pamphlet antisémite Bagatelles pour un massacre le contraint à la démission, avant qu'il ne soit nommé en novembre 1940, par Vichy, médecin-chef de dispensaire dans une autre commune de la banlieue de la capitale.
Un tel parcours est à plusieurs titres significatif : de l'origine sociale et culturelle des nouveaux professionnels et praticiens engagés après-guerre dans le domaine de l'hygiène publique — de la confirmation du rôle joué par une institution comme la Fondation Rockefeller à l'égard des personnes qu'elle s'attache dès 1917, auxquelles, au cours de la décennie suivante, elle va accorder nombre de bourses aux Etats-Unis et dont elle espère qu'ils seront les hérauts auprès de leurs compatriotes de la conception extensive de l'hygiène publique et de la rationalisation médicale qu'elle défend [31] — des voies de la pénétration, dans l'Europe en reconstruction, des idées nord-américaines sur le travail social et l'esprit public (8). S'agissant de Céline, la Fondation Rockefeller présente toutes les caractéristiques d'une instance de formation et de socialisation professionnelle («il sera dit que la Rockefeller remplira ma vie », confie-t-il en 1924 avant de rejoindre la SDN, cit. dans le premier volume de la biographie de F. Gibault, Céline, Mercure de France, p. 248) : l'organisation philanthropique décide de sa vocation, l'oriente vers l'hygiène sociale, lui assure un emploi tant qu'en France la lutte contre la tuberculose ne dispose pas de structures stables et que les lois sociales n'ont pas étendu le marché de la santé : jusqu'en 1928, les postes successivement occupés le sont au sein d'institutions liées, par un biais ou un autre, à la Fondation nord-américaine.
L'insertion professionnelle permise par la continuité d'une telle prise en charge remédie au défaut des possibilités offertes par une extraction sociale plus élevée et peut être considérée comme caractéristique des spécialistes de la lutte antituberculeuse : par sa formation qui combine apprentissage sur le terrain et cursus court, par le cadre public de sa pratique (il n'exercera pas en cabinet de ville), par son origine sociale également, Destouches est représentatif du personnel médical engagé dans la lutte contre la tuberculose, dont les historiens ont repéré l'apparition à cette époque en dehors du cadre libéral de l'hôpital : rapidement enrôlé
en 1918, il est hâtivement formé en 1928 dans un service hospitalier spécialisé avant de devenir un praticien de dispensaire [9] [16].
Sa nomination, après 1928, à un poste en France illustre la réalité de l'élargissement du marché de la santé qui offre à de nouveaux professionnels la possibilité d'embrasser des professions soignantes auxquelles leur extraction sociale ne leur permettait pas de prétendre, mais sa condition salariée en indique aussi les limites, au même titre que la nature publique de l'emploi qui fixe le rang des positions auxquelles il peut prétendre dans la hiérarchie de la profession [3].

Position des hygiénistes
Lorsque Destouches devient l'un d'entre eux, quelle est la situation de ces héritiers des hygiénistes du XIXe siècle que sont les médecins de santé publique, attachés aux bureaux d'hygiène municipaux et aux dispensaires de lutte antituberculeuse, dont la fonction a été instaurée par la loi sanitaire de 1902 ? Nous nous bornerons à rappeler quelques données connues.



Philippe ROUSSIN

Sciences sociales et santé, volume 6, n°3-4, 1988. pp. 5-48.


Notes
(1) La version initiale de cet article a fait l'objet d'une communication présentée lors du séminaire franco-soviétique consacré aux « Enjeux symboliques et sociaux de la santé », organisé à l'initiative de la Maison des Sciences de l'Homme et de l'Académie des Sciences d'URSS à Moscou, du 12 au 16 octobre 1987.
(2) On n'a pas considéré la thèse de médecine sur Semmelweis (1924), qui a fait l'objet de plusieurs commentaires, ni les textes de vulgarisation et de publicité. Sous le titre Semmelweis et autres écrits médicaux, la plupart de ces écrits, dont la liste figure en fin d'article, se trouvent rassemblés, depuis 1977, dans le troisième volume des Cahiers Céline publiés à la NRF. Au long de l'article, pour les différencier de la bibliographie, les textes qui constituent le corpus sont signalés par un système de renvois alphabétiques.
(3) Pour une lecture littéraire de la thèse sur Semmelweis, E. Roudinesco, « Céline et Semmelweis : la médecine, le délire et la mort », in Des psychanalystes vous parlent de la mort, O. Mannoni éd., Tchou, 1978 ; récemment, L. Finas, « L'étoile et le suaire », Revue des Sciences humaines, Médecins et littérateurs 2, numéro 208, 1987-4, Lille; voir également Ph. Bonnefils, «Passage Céline», Revue des Sciences humaines, Médecins et littérateurs, numéro 198, avril-juin 1985, Lille.
(4) L'histoire de cet épisode est désormais bien connue grâce aux travaux de L. Murard et P. Zylberman [29] [31] ; sur sa place dans l'histoire de la lutte contre la tuberculose, voir P.Guillaume [16], sur la Fondation américaine, E.Richard Brown [34]. Aide à l'installation et généralisation de dispensaires qui se différencient des traditionnels bureaux de bienfaisance, formation d'infirmières visiteuses d'hygiène, établissement d'une carte sanitaire, sensibilisation des édiles et de l'opinion constituent les aspects complémentaires du programme de la Mission. Les campagnes publiques d'information et d'éducation (par voie de tracts, de diffusion gratuite de littérature médicale, de conférences, de projections cinématographiques) qui doivent beaucoup aux procédés naissants de la publicité nord-américaine préfigurent les campagnes modernes de prévention. L'épisode témoigne de l'influence et de « l'avance » américaines : la Mission est conçue à l'image des programmes de santé publique - où s'investit alors l'essentiel de l'effort missionnaire américain à l'étranger - que la Fondation Rockefeller et sa commission internationale de santé ont commencé de lancer hors des Etats-Unis avant 1910, et qui représentent, avec l'engagement en faveur de la recherche et de la réforme des études médicales, l'un des volets de son action en vue de la rationalisation des services de santé, de l'intégration de leurs diverses composantes et du développement d'une médecine préventive et sociale.
(5) En tout cas rétrospectivement narrée comme " sortie " du milieu d'origine par l'alliance contractée : « on n'imaginait pas autour de moi qu'on puisse changer de milieu (...) je n'aurais jamais pu faire mes études de médecine si je ne m' étais pas marié. Je suis entré dans une famille médicale» (août 1961, entretien repris dans Cahiers Céline 2).
(6) L.F. Destouches a consacré sa thèse au « sauveur des mères » que décime la fièvre puerpérale, l'inventeur de l'asepsie, l'obstétricien autrichien Semmelweis. Parmi les membres du jury, figure notamment S. Gunn, le vice-président pour l'Europe de la Fondation Rockefeller, correspondant américain de l'organe des médecins hygiénistes, Le Mouvement sanitaire, grâce à qui il est mis en contact avec le directeur de la section d'hygiène de la SDN, Ludwig Rajchman.
(7) L'Hôpital Laënnec est, depuis le début du siècle, un établissement pilote de l'Assistance Publique en matière de lutte anti-tuberculeuse. Léon Bernard est le représentant de la France au Comité d'hygiène de la S.D.N. En 1928, il devient le premier titulaire de la Chaire de clinique phtisiologique, créée cette année-là avec le soutien du Conseil général de la Seine et de H. Sellier, futur ministre de la Santé du gouvernement de Front Populaire.
(8) Cf. parmi d'autres exemples, l'ouvrage d'A. Tardieu, Devant l'Obstacle : l'Amérique et nous (Paris, 1927).

Louis-Ferdinand Céline par Detlev Foth


mercredi 28 mars 2012

Le Petit Célinien - Lettre d'actualité n°24

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Le Petit Célinien - Lettre d'actualité n°24.

lundi 26 mars 2012

Louis-Ferdinand Céline et la pharmacie par Lucie Coignerai-Devillers (1986)

Le hasard a fait tomber entre nos mains une publication, certes déjà ancienne, sur Louis-Ferdinand Destouches, docteur en médecine, plus connu sous son nom de plume de L.-F. Céline (1894-1961) : le n°3 des Cahiers Céline (Gallimard, 1977) où sont réunis des textes médicaux de cet auteur présentés par J.-P. Dauphin et H. Godard. Il nous a paru intéressant d'en dégager un aspect peu connu de l'oeuvre de cet écrivain hors série : sa contribution aux industries pharmaceutiques, au double titre de chercheur et de rédacteur publicitaire.
Déjà, la lecture de sa thèse nous entraîne dans un univers bien étrange. Sa rédaction dans un stle qui annonce le Voyage au bout de la nuit, voire Bagatelles pour un massacre, correspond bien peu à celle qui est de tradition dans ce genre de travaux. Le sujet en est connu. Épouvanté de la mortalité effroyable par septicémie qui frappait les parturientes des hôpitaux de Vienne, Semmelweis en vient à déterminer que l'infection est propagée par les mains sales des étudiants, qui effectuent des touchers sans se désinfecter les doigts : 40 % d'accouchées en meurent. Lorsqu'elles sont soignées par des infirmières aux mains désinfectées, le taux de mortalité par puerpérale tombe à 0,2 % ! Mais l'opposition des grands patrons est féroce et Semmelweis engagera un combat dans lequel sa raison sombrera. Telle qu'elle est retracée par Céline, la fin hallucinante de Semmelweis, jetant des morceaux de chair de cadavre sur les étudiants, est tellement outrée que les médecins hongrois enverront une protestation à l'Académie de Paris.
Moins connu est un autre travail du Dr Destouches-Céline : menant une carrière en « dents de scie » qui va de l'exercice médical privé aux dispensaire d'hygiène sociale, puis à la collaboration « alimentaire » aux industries pharmaceutiques, il met au point et présente au public une spécialité, la Basedowine, ainsi composée :
- poudre d'ovaires : 0,075
- extrait thyroïdien : 0,05
- monobromo isovalerylurie : 0,15
- extrait acéto-soluble d'hormone ovarienne : 0,01(pour un comprimé).
Le produit est enregistré au Laboratoire National de contrôle des médicaments en 1933 sous le n° 343-4 et commercialisé par les Laboratoires R. Gallier, 1 bis, place du Président-Mithouard, Paris VIIe. Il restera en vente jus qu'en 1971.
Selon son auteur, la Basedowine est efficace contre le Basedow fruste et léger, le nervosisme thyroïdo-ovarien, si fréquent dans la population féminine des villes et des campagnes, les règles douloureuses ou irrégulières, la ménopause naturelle ou artificielle. Un bel encart reproduit dans les Cahiers Céline traduit très fidèlement et très agréablement cette notion d'équilibre retrouvé.
En 1925, Céline- Destouche avait publié chez Doin un ouvrage sur La quinine en thérapeutique qui fut traduit en espagnol, en italien et en portugais.
De l'exercice classique de la profession à ses incursions dans la médecine sociale et à ses travaux cités ici, on devine que Céline, plus que médecin, se voulait chercheur. Deux communications de lui à l'Académie des Sciences sur Convoluta Roscoffensis (1920) et Galleria Mellonella (1921) ont été ainsi jugées par le Pr André Lwolff : « L'une et l'autre publications portent témoignage d'une certaine hâte et d'une naïveté non moins certaine dans la pensée et dans l'expression. L'ensemble correspond assez bien à cette image du chercheur que l'écrivain, sans ménagements, tracera dans le Voyage et qui, paradoxalement, est sa propre image... Nul ne regrettera qu'il ait sacrifié le métier de chercheur à celui d'écrivain. Sa contribution à la science eût difficilement pu égaler en valeur et en originalité son apport aux lettres, qui est considérable ». (Figaro littéraire, 7-13 avril 1969).
J'ai eu le bonheur de rencontrer une dame très âgée, d'une mémoire et d'une intelligence remarquables, qui, femme du chirurgien-chef de l'hôpital de Saint-Denis, eut le privilège de rencontrer le Dr Destouche : elle garde de lui le souvenir d'un être courtois, doté d'une facilité d'élocution hors du commun et dégageant une « aura » extraordinaire. Peut-être n'était-il pas inutile de rappeler l'incursion que ce littérateur de choc fit dans le domaine pharmaceutique.

Lucie COIGNERAI-DEVILLERS
Revue d'histoire de la pharmacie, 74e année, n°269, 1986. pp. 137-139.

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dimanche 25 mars 2012

Louis-Ferdinand Céline par Trémois (1991)

Crayon sur papier
27,5 x 22 cm
www.tremois.com

Homo comicus : ou l'intégrisme de la rigolade par François L'Yvonnet

Ce pamphlet est né d’un agacement, celui de voir parader sans vergogne, à longueur de médias, une ribambelle d’humoristes d’un nouveau genre, moins amuseurs que donneurs de leçons, moins « comiques » qu’agents autoproclamés du Bien. Ils éreintent mais sans risque, ils accusent, ridiculisent, frappent de dérision sans ménager la moindre possibilité de défense. Des procureurs hargneux, dans des procès joués d’avance. Le sérieux, voilà l’ennemi. Ils règnent à la radio, à la télévision, dans la presse écrite, publient des livres, font des films, achètent des théâtres… C’est une nouvelle féodalité, avec ses prébendes et ses privilèges. C’est un nouvel intégrisme, celui de la rigolade. Il faut rire de tout mais avec eux. Le rire, « leur » rire est la norme. À les écouter, ils seraient l’actuelle incarnation de la liberté d’expression et de toutes les valeurs réunies de la démocratie. On croit rêver… Leurs saillies sont pourtant d’une incroyable platitude et leurs prêchi-prêcha, troussés à la va-vite, épargnent les vrais puissants. Curieuse époque que la nôtre, qui voit le « bas-bouffon » tenir lieu de conscience et de pensée.

François L’Yvonnet est professeur de philosophie et éditeur (L’Herne et Albin-Michel). Derniers ouvrages parus : Regards sur le sport avec Benjamin Pichery (Le Pommier, 2010) ; Cahier « Michel Serres » avec Christiane Frémont (L’Herne, 2010) ; Louis Massignon, Écrits mémorables avec Christian Jambet et François Angelier, 2 volumes (Robert-Laffont, coll. « Bouquins », 2009).

François L'Yvonnet, Homo comicus : ou l'intégrisme de la rigolade, Mille et une nuits, 2012.
Commande possible sur Amazon.fr.

samedi 24 mars 2012

Frédéric Vitoux - France Inter - 22 mars 2012

Frédéric Vitoux, qui vient de publier Jours inquiets dans l'île Saint-Louis chez Fayard, était l'invité de François Busnel jeudi 22 mars 2012 sur France Inter. Il évoque son parcours, ses parents collaborateurs, sa passion pour la littérature, le choc à sa première lecture de Céline, Rebatet...



>>> A lire :
La vie de Céline, rééd. Folio, 2005.
Bébert : Le chat de Louis-Ferdinand Céline , Grasset, 1976
Le Dictionnaire amoureux des chats, Plon, 2008.
L'ami de mon père, Seuil, 2002

jeudi 22 mars 2012

Cousu de fil rouge : Voyage des intellectuels français en Union Soviétique. 150 documents inédits des Archives russes

André Gide, Henri Barbusse, Jean Renoir, Louis-Ferdinand Céline, Louis Aragon, Paul Nizan, André Malraux… A l’heure du stalinisme triomphant et de la « grande lueur à l’est », nombreux furent les artistes et les écrivains à sacrifier au rituel du voyage en URSS.
Un « tourisme politique » d’un genre bien particulier, avec ses codes, ses mises en scènes et ses trajets balisés. Certains de ces voyages sont restés célèbres, tel celui d’Edouard Herriot qui ne vit rien de la famine en Ukraine ou d’André Gide dont les deux livres édités à son retour eurent un considérable écho. Comment étaient organisés ces séjours très contrôlés au pays des soviets ? Et quels étaient leurs relais en France ? Pour répondre à ces questions, et à beaucoup d’autres, Sophie Coeuré et Rachel Mazuy ont rassemblé 150 documents inédits, qui jettent un éclairage passionnant sur ces fameux voyages.
Retrouvés dans les Archives d’Etat de la Fédération de Russie, ils mettent en lumière les échanges entre l’administration soviétique, les organisations françaises et ces écrivains voyageurs dont la clairvoyance ne fut pas la qualité dominante… Une mine d’informations sur un grand mythe littéraire et politique.

Collectif, Cousu de fil rouge : Voyage des intellectuels français en Union Soviétique. 150 documents inédits des Archives russes, CNRS, 2012.
Commande possible sur Amazon.fr.

Claude Duneton est mort

L’écrivain Claude Duneton est décédé mercredi 21 mars à l'âge de 77 ans. Amoureux des mots et de la langue, curieux d'expressions traditionnelles et ex- professeur d'anglais, il est l'auteur d'une trentaine d'ouvrages, dont La puce à l'oreille et Le Monument, roman racontant l'histoire de 27 poilus de 14 à n'être jamais revenus à son village de Lagleygeolle, en Corrèze.

Pour les céliniens, il restera l’auteur du Bal à Korsør (Grasset, 1994), d’une très belle préface à Céline au Danemark, 1945-1951 de David Alliot et François Marchetti (Ed. du Rocher, 2008) et d'une préface à une biographie de Gen Paul, Gen Paul : Un peintre maudit parmi les siens (La Table Ronde, 2007).

A lire : Sa réaction à la "polémique Céline" de janvier 2011 : Une querelle indigne (Le Figaro, 27 janvier 2011)

mardi 20 mars 2012

Théâtre : Reprise de L.F. Céline "Y en a que ça emmerde...?" du 27 mars au 15 avril 2012

Stanislas de la Tousche reprend L.F. Céline "Y en a que ça emmerde...?" du 27 mars au 15 avril 2012 au théâtre Aires Falguière à Paris, spectacle construit autour de Féerie pour une autre fois, D'un château l'autre, Rigodon, des entretiens et de la correspondance de Louis-Ferdinand Céline.

http://yenaquecaemmerde.fr/

Théâtre Aire Falguière
55 rue de la procession
Paris 15ème

Du 27 mars au 29 avril 2012
Les mardis et vendredis à 21h
Les dimanches à 15h30
Relâche dimanche 8 avril

Réservation : 01 56 58 02 32 ou sur www.billetreduc.com


A lire : Les Entretiens du Petit Célinien : Stanislas de la Tousche

Louis-Ferdinand Céline par Alvaro Delgado

Erratum : Ce portrait, que l'on vous présentait il y a quelques jours, n'est pas de Trémois, mais du peintre Alvaro Delgado, et date de 1994.

lundi 19 mars 2012

Lecture de Voyage au bout de la nuit le 22 mars 2012 à Bruxelles

Le Bozar Book Club, club de lecture francophone bruxellois, consacrera sa séance du 22 mars 2012 (20h30) à Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline.

Une soirée placée sous la direction de Lila Azam Zanganeh, parisienne d’origine iranienne qui a enseigné la littérature et le cinéma à l’Université d’Harvard et a notamment écrit pour Le Monde et The New York Times. En 2011, elle a publié son premier livre, L’Enchanteur (Ed. L’Olivier), qui traite de Nabokov et du bonheur.

Palais des Beaux-Arts
Rue Ravenstein 23
1000 Bruxelles

Informations & tickets
02 507 82 00.

www.bozar.be

Nord de Louis-Ferdinand Céline – Gazette de Lausanne – 30 juillet 1960

Ce dont il faut bien être convaincu, avant d’ouvrir un livre de Céline, c’est que tout ce qu’on raconte sur les désastres de la guerre est faux. Ce n’est pas vrai qu’elle a fait des millions de victimes, elle n’en a fait qu’une : le pauvre Louis-Ferdinand. Pour le reste, ce sont ceux qui lui en veulent qui ont voulu faire croire que d’autres avaient souffert. Lisez-le et vous serez fixés : on se gobergeait dans les bunkers de Berlin, les déportés du travail « résistants » distribuaient des grenades dans les stations du U-Bahn, les prisonniers français n’avaient qu’une seule préoccupation : faire des ennuis au pauvre Louis-Ferdinand. Quant aux objecteurs de conscience, parlons-en ! Dans leurs pyjamas rayés, ils étaient indécents d’embonpoint et se la coulaient douce en coupant des arbres sans se presser. Au milieu de ce monde de profiteurs, la trio que constituaient Louis-Ferdinand, sa femme Lili et son ami Le Vigan qui tombait doucement dans la folie (j’oubliais Bébert, le « greffe ») représentait à lui seul l’élément vraiment tragique de l’époque. Ce qu’on ne nous dit pas, c’est la raison pour laquelle Louis-Ferdinand se trouvait en Allemagne, vers la fin de l’année 1944. Mais c’est ainsi. Et si vous ne vous résignez pas à accepter une telle vision de l’histoire, il est inutile que vous ouvriez le dernier roman de Céline. Encore une fois, Céline n’est pas un auteur que l’on peut juger, dès l’instant qu’on ne le considère plus seulement comme un écrivain. Au risque de me voir à nouveau repris par d’aussi attentifs lecteurs que Marcel Arlan et Jean Paulhan, je répéterai ici ce que j’ai déjà écrit et qui m’a valu une bienveillante citation dans le sottisier de la NRF : il faut prendre Céline ou le vomir. Il faut admettre ses haines recuites, sa fureur impuissante devant tout geste généreux, et plus particulièrement devant toute générosité qui ne s’adresse pas à lui. Il faut admettre ses bassesses et oublier tout de l’homme – qui, vraiment, me donne la nausée – et le lire comme s’il nous tombait de la Lune, comme s’il parlait d’événements qui ne nous ont jamais concernés. Cette précaution prise, on peut y aller. Mais pas avant, sinon la lecture que vous entreprendrez risque de provoquer en vous des réactions qui peuvent être de diverses sortes, mais qui seront toutes également contraires à un paisible jugement critique : ou vous vous indignerez,, ou vous penserez avoir affaire à un dément. Dans un cas comme dans l’autre, vous ferez entrer en ligne de compte, dans votre jugement, des éléments – moraux ou psychologiques – qui n’ont plus rien à voir avec la littérature. Bien entendu, il existe des livres dont l’auteur nous est, à travers son œuvre, sympathique. Ce ne sont pas toujours les meilleurs, quoiqu’on exagère l’importance des mauvais sentiments en littérature et que, en dépit de ce qu’en disait Gide, les bons ne lui sont pas toujours contraires. Si vous tenez absolument à porter un jugement sur l’auteur de Nord, ou plutôt si vous n’arrivez pas à vous en empêcher, pensez à lui en vous le représentant sous un aspect qui vous fera oublier tout ce que vous avez à lui reprocher : pensez à lui comme à une sorte de clochard génial, dont les haines ont perdu toute force et toute force de nuire. Céline est d’ailleurs un homme qui n’a pas une idée à lui et il a fallu vraiment que l’époque fût démente pour que ses cris et ses haines trouvent un écho et pour que les condamnations désordonnées qu’il porte soient exécutées. Il n’a pas eu de chance puisqu’il a vécu dans un monde aussi fou que lui, et on pouvait bien prendre au sérieux ses divagations quand on considérait Houston Chamberlain comme un philosophe et Montandon comme un ethnologue. Maintenant c’est fini et, certes, le pauvre Céline a payé cher la malchance d’être fou dans un temps où d’autres hommes étaient frappés de la même folie. Ce que je voulais dire en commençant, c’est que contrairement à ce qu’il pense, il n’a pas été le seul à payer. Mais je ne chercherai pas à peser ce qui est le plus lourd, de payer pour la folie des autres, ou pour la sienne.
En écrivant D’un château l’autre, nous voyons maintenant que Céline avait entrepris une sorte d’épopée sordide : celle des collabos entraînés en Allemagne à la fin de la guerre pour leur fidélité à Pétain, pour quelques uns, par la frousse pour bien d’autres. Céline, avec Lili et Le Vigan, fait partie de la deuxième catégorie. Il n’aime pas les « boches », mais il pense courir tout de même moins de risques sous les bombes alliées que devant les fusils français. Et, les fureurs d’alors ayant été ce qu’elles étaient, il n’a certainement pas tort. Nous l’avons vu à Sigmaringen, le voici maintenant arrivant à Berlin. Protégé par un médecin, Hauboldt, à qui sa situation dans la hiérarchie nazie procure de nombreux avantages, Céline, après un séjour dans la capitale bombardée, est placé dans une sorte de château prussien, peuplé de personnages picaresques dont l’occupation principale est de nourrir les uns à l’égard des autres une haine meutrière qui finit par se satisfaire. Bien entendu, le récit n'est pas simple et il arrive souvent à Céline de quitter l’Allemagne de 1944 pour maudire ceux qui, dans la France de 1959, continuent à ourdir contre lui les complots que sa manie de la persécution voit partout. Qu’il s’agisse de son éditeur, des dirigeants de la Télévision Française ou d’Anne Franck, qu’il appelle Esther Loyola (tout intérêt suscité par quelqu’un d’autre que lui est non seulement une injure qu’on fait à Céline, mais une blessure qu’on lui porte), l’actualité célinesque se mêle sans arrêt au récit des aventures passées. Le plus curieux est de constater qu’il ne se sent aucune fraternité avec ceux qui ont commis les mêmes erreurs que lui, ou plutôt qui ont suivi le même chemin et payé, plus ou moins que lui, pour avoir fait ce choix. Il mêle dans ses imprécations, il rassemble dans l’immense complot que toute une société ne cesse de mener contre lui, Rivarol et Le Figaro, Cousteau et Mauriac, et jusqu'à Hérold Paquis, qui selon lui pleurait devant le peloton d’exécution parce qu’ils « n’ont pas fusillé Céline ». Mais voilà que je tombe dans le travers que je voulais éviter. Et que j’attache de l’importance à ce que pense Céline, alors que le seul compte ce qu’il a dit et comment il le dit. Dans la mesure où cela seul compte, on peut être sûr que Céline est un des plus grands écrivains de notre temps, et un des plus grands stylistes. Car le style, ce n’est pas bien écrire au sens où les professeurs de grammaire entendent ces mots ; c’est se servir du langage d’une manière efficace, lui rendre une puissance qu’il a le plus souvent perdue, créer grâce à ce langage un monde qui n’existait pas, même si d’autres ensuite vous y rejoignent et vous y suivent. La découverte de ce monde nouveau est le signe même du génie, et c’est ce que Malraux exprimait en disant qu’avant Dostoïevski, Dostoïevski n’existait pas. Avant Céline, Céline non plus n’existait pas et les écrivains dont on peut dire la même chose ne sont pas nombreux.
Le danger que court le styliste, c’est de voir se transformer sa découverte en procédés et ces procédés en tics d’écriture. Céline n’a pas échappé à ces risques. Après le Voyage et Mort à crédit, il s’est égaré dans Féerie pour une autre fois, où il semblait que tout son génie se fût perdu et où « la petite musique » dont il parle et qu’il a bien inventée était étouffée par les manies : cris, interjections, points de suspension et onomatopées. Personne ne saura sans doute ce qui s’est passé en lui, ni comment il a soudain recouvré ses moyens. Mais, après ces désolantes Féeries, D’un château l’autre nous rendait un Céline qui s’était retrouvé. Nord est de la même veine, comme le sera encore, je l’espère, le troisième épisode de son épopée , puisque Céline va certainement nous raconter la fin de ses aventures.
L’univers imprécis de Céline, où rien n’existe vraiment que lui-même, d’autres y ont accédé après lui. Ceux qui prévalent ne sont pas les épigones du genre d’Albert Paraz, qui ne faisait que pasticher, mais ceux qui ont découvert en Céline la source de leur propre génie. Miller est de ceux-là et on peut prétendre que, avant Miller, Miller existait déjà, à moins qu’on ne préfère dire que sans Céline, Miller n’existerait pas. On s’aperçoit d’ailleurs, et précisément en comparant Miller et Céline, que l’art de ce dernier, son style et son langage, ont pour origine une conception du monde tant soit peu démente, mais parfaitement cohérente. Au centre de l’univers se trouve l’homme qui parle et qui ne parle jamais que de lui-même. Rien n’existe que ce qui le concerne et tout ce qui le concerne revêt une importance démesurée, ou plutôt à la mesure de ce personnage unique. Les choses et les êtres qui l’entourent naissent de leurs rapports avec lui, sortent du néant sous son regard et y retournent quand il le désire. Ces êtres, ces choses, ainsi que les événements, aussi bien dans leur existence que dans leur nature, ne sont que par rapport à celui qui parle. C’est donc un univers sans absolu, où rien n’existe pour soi, et tout en sera exclu qui se réfère à ce qu’on appelle des valeurs. Cependant l’être central ne vivra pas seulement au sein des choses et au milieu des êtres. Il aura des idées, mais elles seront sans aucun rapport avec une réalité que nous connaissons, que cet être central ignore, refuse ou méprise. Ainsi se construira un étrange solipsisme où rien ne sera assuré, à l’exception de celui qui parle. L’univers entier prendra les apparences d’une sorte de rêve vécu. Si les choses et les autres êtres se situent dans une sorte de brume étrange, tout ce qui concerne directement le narrateur est d’égale importance : il n’y a chez Miller ou chez Céline ni pornographie ni scatologie, mais attention aux seuls faits existants dont ils sont sûrs, et qui sont ceux dont ils ont le plus vivement la connaissance immédiate. C’est pourquoi l’érotisme qui marquait leurs premières œuvres diminuera à mesure qu’il occupera moins de place dans leur propre vie. Il n’y a rien, dans cet érotisme, de concerté, rien que la transcription candide d’une préoccupation existante et qui disparaîtra de leur envie quand elle s’apaisera dans leur vie. Bien entendu, il n’y a pas un parallélisme absolu entre l’œuvre de Miller et celle de Céline. Miller s’évade trop souvent du solipsisme célinien, il a trop de points de vue a priori sur les choses et les êtres pour que son œuvre ait à la fois la simplicité et l’unité de celle de Céline. Miller a des idées, des opinions sur les choses et les gens qu’il ne situe pas uniquement par rapport à lui-même. Mais il semble que l’univers des Tropiques soit bien celui de Céline, celui du solipsisme. Quant à Céline, il n’a aucune idée a priori, aucune philosophie construite à partir d’une autre philosophie, ce qui est le cas de la plupart des philosophies. Il voit, il ressent le monde d’une certaine manière, et il l’exprime selon cette manière. Ce qui fait de lui un grand écrivain, c’est qu’il a trouvé le moyen de nous faire pénétrer dans ce monde, qui nous est par définition totalement étranger, puisque seul, Céline l’habite.

Jean BLOCH-MICHEL
Gazette de Lausanne, 30 juillet 1960.

dimanche 18 mars 2012

Le maître et le professeur par Isabelle BUNISSET (Sud Ouest, 18 mars 2012)

Dans les années 1950, un jeune Américain juif, Milton Hindus, cherche à comprendre Céline pour l'avoir admiré. Fiasco. Ce professeur à l'université de Chicago qui reconnaissait à l'auteur du « Voyage » d'avoir donné à la littérature « un frisson nouveau » finit par exécrer l'écrivain français. La haine serait-elle contagieuse ?

L'histoire avait pourtant bien commencé. Début 1947, il lui envoie des lettres enthousiastes et de menus cadeaux. Il souhaite mener une véritable croisade en sa faveur afin qu'on reconnaisse son « génie littéraire » et que soit réédité « Mort à crédit ». Céline, alors durement éprouvé par son incarcération, crevant de froid et d'oubli dans sa baraque au Danemark, ne peut négliger une telle aubaine : « Vous faites merveille. Vous me faites revivre aux USA. C'est le miracle. »
Milton Hindus entreprend alors le grand voyage. Trois semaines auprès du maître à l'observer, à retranscrire ses vaticinations, palinodies et autres gracieusetés. Mais l'admiration vieillit vite. Le 11e jour, premières escarmouches : « Céline est une vipère » ; le 23e : « Il m'a rendu aussi fou que lui » ; le 24e : « Juifs et aryens… tous les mêmes ». Le rideau est tiré, la scène jouée. Mais le professeur n'a pas saisi son rôle.

Géant estropié
Il est vrai que Céline n'a jamais tenu en estime l'université, grande pourvoyeuse de fumée et de « ratés ». Afin de se venger, le professeur publie « Le Géant estropié ». Le 23 août 1949, Céline lui répond : « Je ne vous ai fait aucun mal et vous m'assassinez. » Il l'accuse de l'avoir trahi, menace de lui intenter un procès et se plaint au président de la Brandeis University, où Hindus enseigne.
Tel était Céline, retors, rusé, grossier mais aussi délicat prosateur. Paul Morand l'avait pressenti : « Céline n'a pas d'amis, sur terre ni au ciel. » Le lecteur doit demeurer son seul confesseur. C'est pourquoi l'essentielle valeur de ces missives réside dans le dévoilement d'un art poétique, d'une profession de foi, d'un attachement filial pour la langue française. De telles confidences préfigurent le génial « Entretiens avec le professeur Y ».
Au-delà des échanges musclés, on apprend comment Céline cisèle les mots, les agence, les ajoure pour les « brancher sur l'émotion » et les rendre enfin vivants. Passionnantes également, les révélations sur la musicalité de son écriture : « Je saurais s'il le fallait faire danser les alligators sur la flûte de Pan. » Sans doute s'agit-il là d'une des plus instructives correspondances sur les chausse-trapes littéraires et l'infini labeur d'un « style » : « Forcer le rêve dans la réalité, […] tout est fait hors de soi - dans les ondes je pense. C'est un labeur bien ouvrier - ouvrier dans les ondes. »
Certes, d'autres écrivains ont été plus aimables et coopératifs, mais aucun n'a su écrire plus juste et plus fort. Céline nous a fait passer d'un siècle à l'autre. Ce n'est pas rien. Les chevaux, quand ils sont de bonne race, ne se prêtent qu'à l'impétuosité. Céline le plus intime, il est là, dans ce combat amoureux avec les mots.

Isabelle BUNISSET
Sud-Ouest, 18 mars 2012.


« Lettres à Milton Hindus, 1947-1949 », de Louis-Ferdinand Céline, nouvelle édition présentée et annotée par Jean-Paul Louis, éd. Gallimard, 304 p., 27 €.
Commande possible sur Amazon.fr.

Bibliographie Louis-Ferdinand Céline

Une nouvelle version de notre bibliographie vient d'être mise en ligne (mise à jour des rubriques "Etudes/Analyses", "Témoignages" et "Discographie").

samedi 17 mars 2012

Faire bouillir le chevreau dans le lait de sa mère : Céline et Proust en Avignon du 7 au 28 juillet 2012

Faire bouillir le chevreau dans le lait de sa mère, spectacle composé par Mikaël Hirsch et Emile Brami à partir de textes de Marcel Proust et Louis-Ferdinand Céline sera joué en Avignon du 7 au 28 juillet 2012 au Théâtre des Halles, à la Chapelle Sainte Claire.

Mise en scène et éclairages d’Ivan Morane
Décor et costumes, Émilie Jouve
Avec : Silvia Lenzi (musicienne), Ivan Morane (comédien) et les voix de Marie-Christine Barrault et Marina Vlady

Du 7 au 28 juillet 2012
19h / Chapelle Sainte Claire
Durée : 1h
Relâche le 17 juillet
www.theatredeshalles.com

L’idée de départ est de rapprocher, confronter, opposer, les deux plus grands auteurs français du XXème Siècle ! Et ce à partir de leurs mamans et grands-mamans. L’angle du spectacle étant d’évoquer le judaïsme qui lie – qu’on le veuille ou non – Proust à Céline.Proust, juif par sa mère, et partiellement en conflit avec ses origines.Céline, antisémite maximaliste.Au tout début de la Recherche, le narrateur évoque les rapports complexes entre sa mère, sa grand-mère et la fameuse bonne, Françoise. Celle-ci étant décrite comme rigide, et obéissant à des règles connues d'elle seule, et Proust glisse là une allusion à la cacherout… Il écrit à propos de Françoise : « la déranger dans ses habitudes était comme "faire bouillir le chevreau dans le lait de sa mère". Cette allusion, placée dès le début de la Recherche, est en réalité, à notre avis, un commentaire de l'auteur sur ses rapports filiaux… En choisissant cette phrase de Proust comme titre du spectacle, non seulement la Compagnie se situe dans la continuité du précédent (sur Céline avec Denis Lavant) : « Faire danser les alligators sur la flûte de pan » (phrase de Céline), mais nous inscrivons surtout les rapports mère-fils dans une forme de cannibalisme saturnien fort intéressante (également renversable, car on peut se demander, dans le cas de ces deux auteurs, si ce ne sont pas les fils qui dévorent les mères ?... « Mort à Crédit » de Céline répond, à notre sens, à cette interrogation ! Concrètement, le spectacle est composé d’une alternance de textes de Céline et de Proust liés, reliés, soutenus par des interventions musicales pour violoncelle, viole de gambe, percussions, accordéon… Lorsqu’il s’agit de textes, lettres des mamans et/ou grands-mamans, les voix de deux comédiennes sont diffusées.
Un rapprochement encore jamais osé entre ces deux « monstres » de la littérature française qui, nous l’espérons, provoquera le rire, engagera à la réflexion, éclairera leurs œuvres sous un angle novateur, et donnera tout simplement l’envie de les (re)lire !

Fallait-il éditer Drieu la Rochelle dans la Pléiade ? par Bernard Morlino

Et si les éditions Gallimard avaient une dette envers Drieu ? En effet, l'écrivain dirigea la NRF lors de l'épisode le plus noir de la célèbre institution, entre décembre 1940 et le printemps 1943. La présence de Drieu dans les locaux de la rue Sébastien-Bottin permit à Gaston Gallimard de faire tourner la boutique alors qu'auparavant il fut question de nommer un administrateur allemand. Le 21 juin 1940, Drieu écrit dans son Jounal: "Quant à la NRF, elle va ramper à mes pieds. Cet amas de Juifs, de péderastes, de surréalistes timides, de pions francs-maçons ya se convulser misérablement." Six mois plus tard, il publiait le premier numéro de la revue où ne pouvait plus signer Benjamin Crémieux, qui mourra à Buchenwald. Le 1er janvier 1943, Pierre Drieu la Rochelle, directeur-gérant de la NRF, écrit dans la revue : "Je n'ai vu d'autres recours que dans le génie de Hitler". Tâche à la fois débile et indélébile. Sous son règne le sigle NRF signifiait Nouvelle Revue Fasciste... Comme il croyait que l'Allemagne nazie était en train de construire les Etats-Unis d'Europe, il misa sur la case du nazisme. Jusqu'à sa mort, Drieu ne cessa pas d'être un foyer de contradictions, égaré dans tous les courants politiques possibles, disant tout et son contraire. A l'inverse de Gaston Gallimard, qui ne fit pas 14-18, Drieu est un ancien soldat de la grande boucherie. "Si Drieu et moi n'avions pas été traumatisés par la guerre, il est évident que nous aurions consacré tout notre temps à écrire des romans au lieu de nous épuiser à trouver des solutions politiques " m'a dit son ami Emmanuel Berl avec la sincérité qui le caractérisait. Quand je l'ai questionné sur Drieu sous l'Occupation, il me confia sans l'ombre d'une hésitation: "C'est lui qui sauva la NRF ! Sans Drieu, l'empire Gallimard risquait de s'effondrer pour toujours". L'audience culturelle de la NRF était si grande que tout Paris répétait une phrase attribuée à l'ambassadeur allemand Otto Abetz : "Il y a trois puissances en France : le communisme, les grandes banques et la NRF ". La revue faisait la pluie et le beau temps dans le monde littéraire depuis sa création en 1909, sous l'impulsion d'André Gide. Drieu fut pris entre deux feux : d'un côté Gaston Gallimard qui avait besoin de lui pour maintenir la NRF; de I'autre Otto Abetz qui se servait de Drieu pour diffuser la peste nazie par le biais d'une diffusion de prestige. Aux différents sommaires de la revue collaborationniste, on note les présences de Jouhandeau, Chardonne, Fernandez, Morand, Léautaud. . . Mais aussi de Giono, Aymé, Audiberti, Armand Robin, Henri Thomas et Fargue. Drieu fit cette remarque : " Je suis loin de croire que Fontaine et Poésie 41,42 aient présenté des sommaires plus importants que les nôtres. (. . ) Toute une nouvelle génération de poètes s'est levée dans la NRF (. . ) Certains m'ont reproché de faire de la politique dans la revue. J'aime mieux ceux qui me haïssent pour y avoir fait une certaine politique ". Présent dans la livraison de la NRF de février 1941, Paul Eluard fut, à la Libération, sans pitié pour le perdant.
Eternel insatisfait, Drieu ne se réjouit pas longtemps de prendre la place de Jean Paulhan : " La revue, la collaboration, tout cela m'embête (.. .) Je suis excédé par le rôle qu'il me faut tenir jusqu'au bout. J'ai souvent envie de me suicider tout de suite ", note t-il dans son Journal, le 17 décembre 1942. Le mois suivant, il tente un examen de conscience : " Ai-je eu tort, ai-je eu raison de me lancer dans cette petite entreprise ? J'ai certes eu tort à l'égard de moi-même (..) le propre d'un écrivain est d'écrire et non de s'occuper de l'écriture des autres ". Berl, encore lui, avait bien raison de dire qu'ils avaient été détournés de l'essentiel en raison de l'actualité qui devenait trop vite de l'Histoire. La NRF cessa de paraîtree en juin 1943, alors que Drieu s'en était déjà détourné deux mois auparavant. La décision de donner à lire la prose de Drieu dans la plus prestigieuse collection Gallimard n a pas été prise à la légère. Dans un passé pas si lointain, dès qu'on évoquait la "pléiadisation" possible de l'auteur de "Rêveuse bourgeoisie", on se ravisait aussitôt afin de ne pas heurter, par exemple, la susceptibilité d'un Hervé Bazin, qui espérait voir son oeuvre connaître les honneurs de La Pléiade. Avec le temps, on finit par récompenser celui qui porta un temps à bout de bras la maison Gallimard. A la fin de la guerre, les écrivains du bon côté frappèrent d'interdiction la NRF, mais ne réclamèrent aucune sanction contre son éditeur qui pouvait toujours éditer leurs livres. Le Comité National des Ecrivains, composé à majorité de communistes, dressa une liste noire où figurait Drieu, qui se suicida le 15 mars 1945, après deux tentatives ratées: "Ma mort est un sacrifice librement consenti qui m'évitera quelques salissures, certaines faiblesses ". Berl et Malraux avaient essayé de le localiser pour l'aider, en vain. Gaston Gallimard assista aux obsèques, à Neuilly, alors que Drieu ne le souhaitait pas. L'éditeur savait ce qu'il devait au disparu sans connaître ce que confia beaucoup plus tard le lieutenant Gerhard Heller, chargé de la censure dans la France occupée : " Drieu m'a demandé de veiller à ce qu'il n'arrive jamais rien à Malraux, Paulhan, Gaston Gallimard et Aragon... " Quand la demande ne fut pas respectée, Drieu intervint pour faire libérer Jean Paulhan. Proférer des horreurs sur sa première femme, Colette Jéramec, ne l'empêcha pas de l'extirper de Drancy. Drieu n'a pas pris soin de ses proches pour plaider ensuite le double jeu. Persuadé de finir en prison ou d'être condamné à la peine capitale,le samouraï de la NRF se supprima. Sa mort violente et celle de Brasillach (fusillé) permirent à Céline, Chardonne et Jouhandeau de mourir dans leur lit.

Bernard MORLINO
Service Littéraire n°50, mars 2012.

Pierre Drieu La Rochelle, Récits, romans et nouvelles, Pléiade, Gallimard, 2012.
Sortie le 15 avril 2012.

vendredi 16 mars 2012

D’une musique l’autre, rencontre avec Denis Lavant - Médiapart - 15 mars 2012

Rencontre avec Denis Lavant.

La musique est celle des mots. Les mots de Louis-Ferdinand Céline.



Céline écrit : «… Je connais la musique du fond des choses, je saurais s’il le fallait, faire danser les alligators sur la flûte de pan…»
Une musique acide, désenchantée, prisonnière du tumulte.



Denis aime Villon, Michaux, Rimbaud, Zo d’Axa, qui veut dire, en grec, j’avance en mordant.
Lui avance avec l’idée qu’il faut rester vigilant, qu’il est bon d’entretenir une pensée critique, intime. D’avancer libre avec ses choix artistiques, réalisateurs, poètes, metteurs en scène.
Il pense qu’il est douteux pour un artiste de se mêler de politique.
La musique des ténors de la campagne lui paraît inaudible.
Nous buvons un thé, la matinée s’achève. Il me semble qu’un chat dort en boule sur le canapé.

Denis Lavant est au Théâtre de l’Epée de Bois, (Paris 12e) du 13 mars au 15 avril (01.48.08.39.74). « Faire danser les alligators sur la flûte de pan », d’après la correspondance de Louis-Ferdinand Céline. Un spectacle composé par Emile Brami, une mise en scène d'Ivan Morane.
Il est au cinéma dans « L’œil de l’astronome, Jean Kepler, une étoile dans l’obscurité », de Stan Neumann.

Xavier LAHACHE
Médiapart, 15 mars 2012.

jeudi 15 mars 2012

Louis-Ferdinand Céline par José Correa






































http://correajose.free.fr/index.htm

Le top 50 des auteurs classiques les plus vendus - Le Figaro - 15 mars 2012

Le Figaro publie le classement des 50 auteurs classiques les plus vendus, (écrivains français et étrangers toutes catégories confondues (roman, essai, théâtre, poésie)) de janvier 2004 à janvier 2012. Louis-Ferdinand Céline, avec 750 000 exemplaires, se place 43è.

1 Guy de Maupassant: 3.790.000 exemplaires
2 Molière: 3.400.000 exemplaires
3 Émile Zola: 2.900.000 exemplaires
4 Albert Camus: 2.810.000 exemplaires
5 Victor Hugo: 2.710.000 exemplaires
6 Agatha Christie: 2.650.000 exemplaires
7 Stefan Zweig: 2.510.000 exemplaires
8 Antoine de Saint-Exupéry: 2.310.000 exemplaires
9 Voltaire: 2.200.000 exemplaires
10 Honoré de Balzac: 2.020.000 exemplaires
11 William Shakespeare: 1.510.000 exemplaires
12 George Orwell: 1.350.000 exemplaires
13 Jules Verne: 1.330.000 exemplaires
14 Jean-Paul Sartre: 1.320.000 exemplaires
15 Charles Baudelaire: 1.280.000 exemplaires
16 Jean Anouilh: 1.240.000 exemplaires
17 Boris Vian: 1.230.000 exemplaires
17 Eugène Ionesco: 1.230.000 exemplaires
19 JR Tolkien: 1.200.000 exemplaires
20 Gustave Flaubert: 1.190.000 exemplaires
21 Robert Louis Stevenson: 1.180.000 exemplaires
22 Romain Gary: 1.140.000 exemplaires
23 Albert Cohen: 1.120.000 exemplaires
24 Pierre de Marivaux: 1.090.000 exemplaires
25 Jean Racine: 1.000.000 exemplaires
26 Georges Simenon: 990.000 exemplaires
27 Alexandre Dumas: 980.000 exemplaires
27 Franz Kafka: 980.000 exemplaires
29 Jean Giono: 940.000 exemplaires
30 Primo Levi: 930.000 exemplaires
31 Prosper Mérimée: 930.000 exemplaires
32 Jack London: 910.000 exemplaires
33 John Steinbeck: 870.000 exemplaires
34 René Barjavel: 870.000 exemplaires
35 Isaac Asimov: 870.000 exemplaires
36 Marguerite Duras: 850.000 exemplaires
37 Jane Austen: 840.000 exemplaires
38 Marcel Proust: 790.000 exemplaires
39 Françoise Sagan: 790.000 exemplaires
40 La Fontaine: 780.000 exemplaires
41 Pierre Corneille: 760.000 exemplaires
42 Denis Diderot: 760.000 exemplaires
43 Céline: 750.000 exemplaires
44 Alfred de Musset: 710.000 exemplaires
45 Arthur Conan Doyle: 700.000 exemplaires
46 Marcel Pagnol: 680.000 exemplaires
47 Dostoïevski: 670.000 exemplaires
48 Oscar Wilde: 630.000 exemplaires
49 Beaumarchais: 620.000 exemplaires
50 Stendhal: 610.000 exemplaires

Daniel Filipacchi évoque sa renconte avec Céline...

Daniel Filipacchi consacre trois pages à sa visite chez Céline au Danemark dans Ceci n'est pas une autobiographie qui vient de paraître chez XO Éditions.

Daniel Filipacchi, Ceci n'est pas une autobiographie, XO, 2012.
Commande possible sur Amazon.fr.

Présentation de l'éditeur
De Salut les copains à Paris Match, Daniel Filipacchi, personnage jusqu'à présent secret et mystérieux, nous dévoile pour la première fois sa « vie mode d'emploi », avec pudeur et insolence, avec sagesse et drôlerie, dans un style direct et original qui ressemble à son parcours.
« J'ai fait à Match tout ce qu on peut imaginer, sauf balayer les bureaux et nettoyer les carreaux. J'ai été maquettiste, chef des informations, directeur du service photo par intérim, photographe, reporter, rewriter, archiviste, garçon de courses. J'ai même rempli quelques fonctions vaguement administratives. Au départ, j'y étais entré directement comme photographe par le plus grand des hasards. Je venais d'avoir vingt ans, un soir de janvier 1948... »

L'auteur
Daniel Filipacchi est le président d'honneur d'Hachette Filipacchi Médias, dont il a fait le plus grand éditeur de presse magazine dans le monde.

dimanche 11 mars 2012

Le Petit Célinien - Lettre d'actualité n°23

Pour recevoir gratuitement par courriel à chaque parution la lettre d'actualité du Petit Célinien, laissez-nous votre mail à l'adresse habituelle : lepetitcelinien@gmail.com.

Le Petit Célinien - Lettre d'actualité n°23.

samedi 10 mars 2012

Dieu, qu’ils étaient lourds...! jeudi 5 avril 2012 à Sèvres (92)

Le spectacle Dieu, qu'ils étaient lourds...!, déjà présenté de nombreuses fois ici, se jouera le 5 avril 2012 à Sèvres (21h).

Avec : Marc-Henri Lamande
Conception, Adaptation et Mise en scène : Ludovic Longelin
En alternance : Ludovic Longelin, Régis Bourgade
Voix off : Véronique Rivière

Construit à partir de différents entretiens que Céline a bien voulu enregistrer pour la radio dans les années 50, ce spectacle est une passionnante rencontre avec l’un des auteurs les plus marquants du XXe siècle. Céline nous parle de sa vie, de son enfance, de ses dramatiques prises de position politique, mais aussi et surtout de son écriture et de ce style qui a bouleversé la littérature.

Jeudi 5 avril à 21h
Le Sel
47 Grande Rue
92310 Sèvres
Renseignements : 01 41 14 32 32
www.sel-sevres.org
sel@sel-sevres.org

jeudi 8 mars 2012

Louis-Ferdinand Céline par Decrouzol (III)






































Après le Danemark… par Bente Johansen-Karild

Après le Danemark…
par Bente JOHANSEN-KARILD

Des années de Céline à Meudon, je ne connais que la relation qui en a été faite par d’autres. Le vieillissement prématuré de Céline est dû, je pense, à des raisons à la fois psychiques et physiques. Psychiquement, Céline a dû être énormément affecté de ne pas être reçu à bras ouverts par ses anciens amis artistes et de voir l’intérêt pour ses livres diminuer notablement. Haines, chagrins et déceptions ont une très forte incidence négative sur tous les processus métaboliques.

Quant aux lavements quasi quotidiens qu’il s’était appliqués depuis bien des années, ils avaient tout simplement empêché son organisme d’assimiler suffisamment les éléments nutritifs nécessaires. Cependant, l’interview d’André Parinaud (1) montre que la puissance intellectuelle de Céline restait intacte, en même temps que l’écrivain admettait que c’était son style, le choix rythmique de ses mots qui lui survivraient et qui constitueraient son apport personnel à la littérature universelle.
Céline ne mettait pas sa lumière sous le boisseau. « je devrais avoir deux Prix Nobel, disait-il, celui de littérature et celui de la Paix ! (…) Mes livres seront lus par la jeunesse de l’avenir. » Comme d’habitude, sa prophétie se vérifia. Cela a été pour moi une expérience singulière que d’entendre en 2002 un enregistrement de la voix de Céline. Cela m’a reportée à l’année 1945, où je l’avais souvent entendu lire ses livres à haute voix pour en juger du rythme sonore. Ce n’est, toutefois, qu’en entendant Pierre Brasseur dire un passage de Voyage au bout de la nuit que j’ai compris pourquoi ce rythme continuait à passionner les céliniens (2).
Lors de mon séjour à Nice en 1946, j’avais acheté un ouvrage de Marcel Stanislas Ducout, La Danse Sonore. Synthèse de la danse et de la musique. A l’époque, le sujet ne m’intéressait pas, occupée que j’étais à faire une carrière de danseuse professionnelle. Plus tard, en tant que thérapeute de la danse, et après plus de quarante ans d’activité, j’ai dû reconnaître que la synthèse de la musique et de la danse agit sur les sentiments à travers l’appareil sensoriel et que c’est là une voie plus directe que la compréhension intellectuelle des mouvements.
Céline dit que l’émotion vient avant le verbe. Et c’est Curt Sachs qui écrit : « La danse est essentiellement la vie à un degré plus intense. » Depuis les débuts de sa carrière littéraire, Céline a été fasciné par la danse et a aimé des danseuses, qui, avec leur joli corps et leurs mouvements gracieux, ont su exprimer d’autres sentiments que lui dans ses livres. Et cela n’a t-il pas été pour lui une tentative inconsciente de préserver son équilibre mental en recherchant l’harmonieux, le beau et l’esthétique ?

Bente KARILD

Traduction et notes de François Marchetti


Notes
1- André Parinaud, Céline, la maîtrise de l’outrance, Le Bulletin célinien, 2001. Edition établie par Arina Istratova. Prix : 21€ franco.
2- Il s’agit, bien sûr, du célèbre passage de la mère Henrouille, bien connu des céliniens, mais qui force l’admiration de tout amateur de littérature. Quarante-cinq ans après l’enregistrement, Pierre Brasseur reste, dans Céline, un modèle que certains devraient garder en mémoire avant d’oser dire du Céline à leur tour.

mercredi 7 mars 2012

Denis Lavant : "Céline est fascinant dans son idéologie et dans son art" - France Info - 6 mars 2012

Denis Lavant était l'invité mardi 6 mars 2012 de Philippe Vandel sur France Info :









Faire danser les alligators sur la flûte de pan, spectacle composé par Émile Brami à partir de la correspondance de Céline, sera repris pour 30 représentations du 13 mars au 15 avril 2012 à la Cartoucherie au Théâtre de l'Épée de Bois.

Avec Denis Lavant.
Mise en scène et direction d'acteur : Ivan Morane
Création lumière : Nicolas Simonin
Création décor et costume : Emilie Jouve

Une coproduction : Réalités et la Compagnie Ivan Morane avec le soutien de la Région Midi-Pyrénées. En partenariat avec France Culture

Du 13 mars au 15 avril 2012
Du mardi au samedi à 21h - Dimanche à 16h

Théâtre de l’Epée de Bois - La Cartoucherie
Route du Champ de Manoeuvre
75012 Paris

Réservations
01 48 08 39 74

mardi 6 mars 2012

Débat "Pour et contre Céline ?" samedi 31 mars 2011 à St-Michel-sur-Orge (91)

Une rencontre-débat est organisée à l'Espace Marcel Carné de Saint-Michel-sur-Orge le samedi 31 mars à 21h autour du thème "Pour et contre Céline ?"

Avec Henri Godard (Céline, 2011), Yves Buin (Céline, 2009) Jacques Henric, écrivain et Antoine Peillon (Céline, un antisémite exceptionnel, 2011).

Les polémiques qui ont accompagné la présence de Céline dans les célébrations nationales, à l’occasion du cinquantenaire de sa mort sont un symptôme. L’idolâtrer ou le haïr revient au même, à un refus de raisonner, mais surtout de le lire. Avec « Voyage au bout de la nuit » et « Mort à crédit » Louis Ferdinand Céline est l’un des écrivains qui a révolutionné l’écriture littéraire au 20ème siècle. Sa puissance d’écriture est exceptionnelle. Mais « Bagatelles pour un massacre », par exemple, est un pamphlet antisémite dont la valeur littéraire est contestée. En scrutant l’œuvre mais aussi la biographie de Céline et son impact sur les textes peut-on obtenir un jugement équilibré et juste ?

Espace Marcel Carné
place Marcel Carné
91240 Saint-Michel-sur-Orge
Tél. 01 69 04 98 33
www.espacemarcelcarne.fr