samedi 30 avril 2011

Les influences culturelles de la Légende du Roi Krogold (I)

Avec ces fragments [de la Légende du Roi Krogold dans Mort à Crédit], on peut reconstituer la totalité du récit que très vaguement. Gwendor a trahi Krogold. Celui-ci a lavé cette trahison dans le sang. Sans doute amoureuse de Gwendor, Wanda prépare une vengeance contre son propre père. Et Thibaut va probablement jouer un certain rôle dans cette histoire de vengeance... En revanche, on connaît suffisamment bien dans quel registre cette « Légende » est inscrite. Selon Ferdinand lui-même, sa « Légende » est un « récit d'une épopée, tragique certes, noble, étincelante !... » (MC, p. 522). Mais l'atmosphère et le décor du récit sont nettement moyenâgeux et chevaleresques. Maurice Bardèche la qualifie d'« un conte de chevalerie (1) » Dans son étude consacrée à la « Légende », Erika Ostrovsky la décrit, de son côté, dans les termes suivants : « L'histoire elle-même n'a rien d'extraordinaire : elle ressemble superficiellement à maintes oeuvres médiévales qui décrivent une lutte entre deux adversaires, et pourrait presque passer pour un pastiche des romans épiques (2). » De fait, les fragments de la « Légende » racontés dans Mort à crédit évoquent avant toute chose un pastiche quelque peu enfantin du roman de chevalerie comme La Légende du roi Arthur.

Mais cette comparaison avec les romans bretons ne serait pas gratuite chez Céline, puisqu'on n'est pas sans remarquer des références celtiques dans les fragments de la « Légende ». A cet égard, on peut par exemple citer ce nom de Gwendor aux consonances assez bretonnantes. D'ailleurs, comme on l'a déjà vu en examinant « Les secrets dans l'île », la Bretagne était une région de prédilection pour Céline. Il existe en fait une lettre adressée en 1944 à un écrivain breton, Théophile Briant, dans laquelle Céline semble revenir sur l'univers de la « Légende » apparue dans Mort à crédit : « Depuis des ans déjà j'erre, je quière et je fouille et ne laisse de jour et de nuit à mander... Les Légendes et le Braz et la Mort où sont-ils ?... [...] Au secours, Théophile, les Légendes se meurent ! mieux qu'Artus sommeillent et ne reparleront plus ! Au combat Gwenchlann barde aux larmes de feu ! (3) » Les « Légendes », la « Mort », « Artus » et le nom de cet ancien poète celtique « Gwenchlann ». Il est intéressant de voir tous ces indices rassemblés dans une dizaine de lignes d'une lettre. Cette lettre elle-même est pourtant écrite pour protester contre l'absence en librairie du recueil de légendes collectées par Anatole le Braz : La Légende de la mort chez les Bretons armoricains (4). D'où, sans aucun doute, cette association de mots « Les Légendes et le Braz et la Mort ». Toutefois, la légende traitée dans ce livre n'est pas de romans bretons proprement dits, mais des récits folkloriques. Il serait donc invraisemblable que Céline ait directement puisé dans le livre d'Anatole le Braz pour sa « Légende », même si l'on ne peut pas nier l'influence de la culture celtique sur celle-ci.

En effet, l'une des sources d'inspiration éventuelles de la « Légende » est liée à une sorte de chevalerie celtique. Elle vient pourtant d'un tout autre domaine, puisqu'il s'agit d'un opéra intitulé Gwendoline. Cet opéra raconte une histoire tragique qui se déroule au VIIIè siècle sur une côte de l'Angleterre entre un envahisseur danois et une jeune Anglaise, Gwendoline (5). Ce nom évoque inéluctablement le personnage de Gwendor de « Légende » de Céline. Gwendoline fut représenté au théâtre de l'Opéra en 1911, cest-à dire à l'époque où Louis Destouches vivait encore dans le quartier de l'Opéra. A-t-il pu assister à la représentation de cet opéra ? Il nous semble que cette hypothèse est assez plausible, puisque Céline se réfère justement à l'opéra dans une lettre écrite à Marie Canavaggia sur un paquebot pour parler du manuscrit de la « Légende » : « La mer donne l'enfance. [...] J'ai ramené le manuscrit [de la "Légende"]. Il progresse tout de même le "pôvre" dans tout ce cataclysme - Il s'agit du moyen âge heureusement et d'un moyen âge d'Opéra ! Que faire de la réalité (6) » Le « moyen âge d'Opéra ». Cette association d'idées peu évidente pour désigner un récit légendaire serait assez éloquente pour supposer une certaine influence de Gwendoline sur le récit médiéval de Céline.

Il est par ailleurs très intéressant de noter que Céline confie dans cette lettre que « La mer donne l'enfance », comme si c'était la raison pour laquelle il a emporté le manuscrit de la « Légende » sur le paquebot. Car, comme on l'a déjà suggéré, dans l'épisode du petit André de Mort à crédit, la « Légende du Roi Krogold » est présentée comme un feuilleton paru dans un illustré pour enfants : « André, il faisait semblant de pas me voir, il s'apportait exprès là-haut Les Belles Aventures illustrées. Il les lisait pour lui tout seul. » (MC, p. 645). Pour se rapprocher d'André, Ferdinand profite justement du fait que la « Légende » est insérée dans un illustré pour enfant comme feuilleton : « Dis donc André, que je lui propose. Moi tu sais je connais toute la suite ! Je la connais par cœur !... Il répond toujours rien. Mais quand même je l'influençais... Il était intéressé... Il l'avait pas l'autre numéro... » (MC, p.646). Cet illustré pour enfants est mentionné dans un autre passage du récit d'enfance de Ferdinand sans que son contenu soit précisé : « Au coin de notre "Passage" en rentrant [du cinéma], [la grand-mère] m'achetait encore à la marchande sur sa chaufferette Les Belles Aventures illustrées. » (MC, p.565)

Du reste, dans l'épisode de la visite à l'oncle Arthur, Ferdinand évoque un autre illustré : « Je croyais le trouver l'oncle Arthur, ratatiné, reprenant, tout à fait foireux, dans un recoin d'une caverne, traqué par trois cents gendarmes... et grignotant des rats confits... ça se passait ça dans Les Belles Images pour les forçats évadés... L'oncle Arthur c'était autre chose... » (MC, p.611) A la différence des Belles Aventures illustrées, Les Belles Images existaient réellement dans l'enfance de Céline. Ce dernier reviendra d'ailleurs là-dessus dans Nord publié en 1960 : « Comics ?... Comics ?... dessinateur ?... je crois pas beaucoup... il trouvera pas... "revenants obligeants" ceux que je connais sont d'un hostile !... m'ont dénoncé de tous les côtés, acharnés la trouille !... question comics, je les ai connus dans ma jeunesse, et en sept couleurs... les Belles Images 0 fr. 10... » (Nord, p.509). Cet hebdomadaire pour enfants fut lancé en 1904 par Fayard. Il se vendait effectivement au prix de dix centimes. Ses pages étaient consacrées surtout aux comics en couleur exactement comme le précise Céline, à cela près que les paroles étaient légendées au lieu d'être données dans des bulles comme dans la bande dessinée d'aujourd'hui.

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Tomohiro HIKOE, Roman et récits légendaire et populaire chez LF Céline, 2004. (Thèse)
Repris dans Le Petit Célinien n°14.

Notes
1- Maurice Bardèche, Louis-Ferdinand Céline, 1986.
2- Erika Ostrovsky, Céline et le thème du roi Krogold, Herne, 1972.
3- Lettre à T. Briant, CC1 p.138, lettre originairement publiée sous le titre d'une "lettre de Céline dans Le Goéland n°72 de février 1944.
4- Anatole le Braz, La légende de la mort chez les Bretons armoricains, 1893.
5- Gwendoline, opéra en trois actes, musique de Chabriet. Sur cet opéra voir Michaël Ferrier, La chanson dans l'oeuvre de Céline.
6- Lettre à Marie Canavaggia du 24/01/1940.


Des lettres inconnues de Louis-Ferdinand Céline aux enchères

Une dépêche AFP du 29 avril annonce la vente de la correspondance inédite de Céline au Dr Alexandre Gentil le 10 mai 2011 à Paris (voir Le Petit Célinien du 22 avril).

Un ensemble de 36 lettres autographes inconnues de Louis-Ferdinand Céline, adressées de 1939 à 1948 au Dr Alexandre Gentil, qui fut un ami très proche de l'écrivain français, sera vendu par Artcurial le 10 mai à Paris, a indiqué vendredi la maison d'enchères.

Restée inédite, cette somme de 116 pages, estimée de 90 000 à 100 000 euros, est importante pour la compréhension des années noires de Céline, sa fuite en 1944, son emprisonnement au Danemark jusqu'en 1947, puis son exil sur les bords de la Baltique jusqu'en 1951. «De nombreux passages de cette correspondance sont la preuve indéniable de l'importance des liens qui existent» entre le Dr Gentil, médecin militaire, et le Dr Destouches, alias Céline (1894-1961), qui s'étaient rencontrés à l'hôpital du Val de Grâce en 1914, souligne la maison Artcurial Briest Poulain F. Tajan dans un communiqué.

Sous l'Occupation allemande, Gentil héberge des collaborateurs, certains envoyés par Céline. Il est l'un des premiers correspondants de Céline quand il est en prison. C'est aussi l'une des rares personnes que l'auteur du Voyage au bout de la nuit avertit de son départ en 1944. Lettre du 15 juin : « Mon bien cher vieux, il a fallu d'une façon pressante partir à la campagne ! (...) J'espère que ce ne sera pas long.» Ce voyage durera sept ans.

Céline écrit le 4 septembre 1945 de Copenhague: «Je ne vis ici qu'en état d'isolement moral quasi-total!» et plus loin «Dans une autre vie, je t'assure que je ne me dévouerai plus pour personne. Je me ferai faire un passeport animal. J'irai à quatre pattes. Je renierai les hommes.»

La publication de trois ouvrages violemment antisémites avait amené Céline à fuir la France au lendemain du débarquement. Après huit mois passés à Copenhague, il est sous le coup d'un mandat d'arrêt pour trahison. En décembre 1945, il est placé en détention dans le quartier des condamnés à mort d'une prison danoise. Le Danemark refuse de l'extrader et le remet en liberté «sur parole» le 24 juin 1947. En avril 1951, l'ancien combattant Louis Destouches est amnistié par la justice française, ce qui permet au plus célèbre des écrivains maudits de rentrer en France.

AFP
Photo: archives La Presse

Londres vue par les écrivains froggies - L'Express - 29/04/2011

Extrait d'un article de Tristan Savin (Lire) paru sur le site de L'Express le 29 avril 2011:

[...]
Paul Morand, attaché à l'ambassade de France en 1913, fréquente les beaux quartiers et les théâtres, dîne chez Scott's, hèle le dernier cab de la ville ("sorti tout droit des premiers Dickens") et affectionne Piccadilly Circus, comparé à une grande horloge à six aiguilles. Il déclare : "Londres est ma mascotte." Son livre Londres paraîtra en 1933. On y peut lire : "De South Kensington, c'est une jolie promenade un matin de mars que de descendre à Hyde Park et à Piccadilly, par Brompton Road, plein de chiens singuliers, de marchands de tulipes et de jolies Anglaises en peaux de panthère, qui vont faire leur marché chez Harrods."

Morand a-t-il croisé Louis-Ferdinand Destouches ? Blessé au front en 1914, celui qui ne s'appelait pas encore Céline est affecté au service des visas du consulat français à Londres et se marie dans la capitale britannique - comme Mallarmé - en janvier 1916.

Guignol's band se fera l'écho de ces années londoniennes : "Y a des moments pour le "Strand", d'autres pour "Trafalgar"..." Et bien sûr des moments pour les pubs : "Il jouait comme ça au piano pour gagner sa vie entre "l'Elephant" et le "Castle", les deux extrêmes du Mile-End. [...] On se retrouvait à La Vaillance, le pub des plus gratins du Lane, l'avenue passagère, celui qu'a sept comptoirs massifs avec proues sculptées dans l'ivoire et rambardes en cuivre à torsades." Céline affectionne les promenades : "Comme ça tout en bavardant on est arrivé au "Mall" la grande Avenue devant le Château... Buckingham Palace... la belle allée cavalière... On s'assoit là sur un banc..."

Bien plus tard, dans Le pont de Londres, le Bardamu du Voyage au bout de la nuit est envoyé en Angleterre. Céline a gardé la nostalgie des quartiers jadis hantés, Trafalgar, St Martin, Hyde Park et le port.
[...]

Tristan SAVIN
L'Express, 29/04/2011

vendredi 29 avril 2011

A paraître (6 mai 2011) : Une enfance chez Louis-Ferdinand Céline de Maroushka

Présentation de l'éditeur
Qui est Louis-Ferdinand Céline pour Maroushka qui, de 6 à 17 ans, prend des cours de danse chez Lucette Destouches? Longtemps, ce ne fut que le "mari de Lucette", un médecin, pauvre, dévoué à ses patients. A mesure que les années passent et que sa passion pour la danse grandit, elle découvre que le docteur Louis Destouches est également Louis-Ferdinand Céline, l'écrivain célèbre et controversé. Sous le regard tendre et quasi maternel de sa professeur, Maroushka apprend son futur métier. Les cours se déroulent à Meudon, dans la maison du maître. Céline est partout sans être vraiment là. C'est son ombre que l'on aperçoit, sa voix que l'on entend comme un écho, entre les cris de Toto, le perroquet, et les aboiements des chiens. Amis ou simples connaissances, écrivains, acteurs et réalisateurs défilent chez Céline. L'enfant côtoie ainsi Arletty, Audiard, Marcel Aymé, Simone Gallimard, Nadine Nimier, Dominique de Roux, Michel Simon... À 17 ans, Maroushka partira se former auprès d'autres professeurs sans s'éloigner pour autant de Lucette, dont elle demeure toujours très proche.

L'auteur
Danseuse de formation classique, Maroushka a travaillé auprès de Roland Petit. Désireuse de renouer avec ses origines (une grand-mère manouche), elle a mélangé dans ses spectacles danses tziganes et orientales et fait renaître ainsi la tradition des Ghawasies, les Tziganes d'Égypte.

Maroushka, Une enfance chez Louis-Ferdinand Céline, Ed. Michel de Maule, 2011.
Pré-commande possible sur Amazon.fr.

jeudi 28 avril 2011

Céline au cinéma par Emile Brami

Voici le texte de l'allocution d'Emile Brami lors du colloque Céline des 4 et 5 février 2011 au Centre Pompidou. Plus une prise de notes qu'un texte écrit, les lecteurs souhaitant approfondir le sujet pourront se reporter aux articles d'Emile Brami des numéros 4 et 6 des Etudes céliniennes.


Céline et le cinéma, c’est une vieille histoire.
Elle commence avec la grand mère Guillou emmenant son petit fils Louis voir les films de Méliès. Ce seront par la suite, dans Voyage au bout de la nuit, les pensionnaires de l’asile d’aliénés que Parapine enferme dans la salle du Tarapout où ils reverront en boucle le même film appliquant les « théories récentes du professeur Baryton sur l’épanouissement des petits crétins par le cinéma ». C’est encore cette séquence de Tovarich, un film de Jacques Deval daté de 1935 où le docteur Destouches fait quelques secondes de figuration.

Il faut aussi se souvenir que les premières œuvres de Céline, si l’on excepte l’insignifiant Des vagues, ont été écrites pour le théâtre donc dialoguées, et que L’église peut être considéré comme l’ébauche d’un scénario de Voyage au bout de la nuit. On oublie souvent que Céline a écrit directement pour le cinéma : Secrets dans l’île, Arletty jeune fille dauphinoise et Scandale aux abysses sont trois textes présentés comme des scénarios de films pour les deux premiers, de dessin animé pour le troisième.

Mais, jusqu’à la fin de sa vie, le grand rêve cinématographique de Céline resta l’adaptation de Voyage. Cette volonté de l’écrivain ayant trouvé un fort écho dans le milieu du cinéma, on s’étonnera que 75 ans après la publication de son premier livre, aucune de ses œuvres n’ait été portée à l’écran.

Pourtant l’idée de filmer Voyage vient quasi immédiatement. Alors que le livre est sorti en octobre 1932, le 4 mars 1933 les éditions Denoël cèdent à Abel Gance les droits d’adaptation. La carrière de Gance bat déjà de l’aile, réaliser ce roman sulfureux qui est aussi un énorme succès de librairie la relancerait peut-être. Le critique Élie Faure, amis commun aux deux hommes, sert d’intermédiaire. Il écrit à Gance le 13 mars :

« Je crois qu'on peut tirer un très beau film de cette orgie littéraire, qui s’accorde assez bien avec votre génie tumultueux. mais il faudra faire appel a tout ce que vous pourrez découvrir en vous de mesure et d’équilibre, justement pour maintenir dans l’ordre bondissant de son cœur et du notre cette épopée multitudinaire. Quels tableaux a brosser : la guerre, l’Afrique, l'Amérique des buildings et des girls, la banlieue sordide, l’asile d’aliénés ! Je voudrais être a votre place. »

La rédaction d’un premier découpage est confié à un journaliste bordelais, Maurice Norman qui, ayant eu vent du projet, a proposé ses services. Le 17 décembre il envoie 22 feuillets dialogués intitulés L’arrivée à New York. Le travail n’est pas fameux, Gance est un esprit brouillon qui brasse en permanence mille projets, il passe rapidement à autre chose. On en restera là.

Après cet échec, Céline se fera son propre démarcheur. le 23 juin 1933 il écrit à Robert Denoël :

« J'ai rencontré à Prague le metteur en scène Youngbans. Il se pourrait qu'il s'entende avec moi pour tenter a Paris la mise en film du Voyage. Il viendra en septembre. »

Youngbans s’appelle en réalité Junghans, on n’entendra plus parler de lui.

Pendant l’été 1934, aux Etats-Unis, tout en essayant de reconquérir Elisabeth Craig, Céline toujours pragmatique essaie de vendre son livre à Hollywood, aidé par Jacques Deval qui travaille sur place, là encore sans succès.

Par la suite, de nombreux réalisateurs parmi les plus connus de l’époque auront à leur tour la velléité de porter Voyage au cinéma. On peut citer parmi les plus connus Julien Duvivier, Pierre Chenal, Claude Autant-Lara. Le nom de Gabin, spécialiste des rôles d’homme du peuple écrasé par la vie, est avancé pour jouer Bardamu. Rien n’abouti.

De façon étonnante, alors que l’on a jamais tourné autant que pendant la période de l’occupation, que Céline est à l’apogée de sa gloire, aucun projet n’est à signaler entre 1940 et 1945.

Il faudra attendre le retour d’exil et le succès de D’un château l’autre pour voir apparaître d’autres tentatives. On parle d’une adaptation par Jean Anouilh, Claude Autant-Lara manifeste de nouveau son intérêt pour Voyage et commande même la musique du film à Jean-Claude Descaves, le petit fils de Lucien Descaves qui avait défendu le livre pour le prix Goncourt. Roger Nimier avance le nom de Louis Malle.

Après la disparition de Céline, tout ce qui compte dans le cinéma se mettra sur les rangs, Claude Berry, Jean-Claude Rassam, Clément, Téchine, Corneau, Vadim, Malle, Godard, Milos Forman, Pialat qui se distinguait en voulant mettre en scène Mort à crédit. Trois noms émergent toutefois de la foule des candidats : Michel Audiard, Sergio Leone et Jean-François Stévenin qui, chacun à sa manière, semblent vouloir aller plus loin que le simple effet d’annonce.

Audiard, qui ne cesse de clamer son admiration pour Céline, est celui qui fera le plus de bruit médiatique. En 1964, il déclare dans la presse qu’il rédigera l’adaptation et les dialogues de Voyage, que Fellini le mettra en scène avec Belmondo dans le rôle de Bardamu, Shirley mac Laine sera Molly, le financement, un milliard d’ancien francs, une somme énorme pour l’époque, a été réuni, et madame Destouches a donné son accord. Le projet n’avance pas, mais Audiard ne cessera d’y revenir, du moins en paroles.

Sergio Leone est un autre grand admirateur de Céline, dans des entretiens accordés à Noël Simsolo il dit :

« Céline vous marque jusqu’a la mort. J’ai souvent pensé en faire un film. Mais je ne sais pas s’il serait raisonnable de toucher un tel chef-d’œuvre. Quand j’aime un auteur, j’étouffe d’un sentiment de pudeur. Je suis aussi un auteur, en tant que cinéaste. Spontanément, je trahirai l’œuvre de base de Céline. J’en ferai quelque chose d’autre. et je ne sais pas s’il faut le faire. »

Jean-François Stévenin, enfin, fait partie des originaux qui veulent adapter un autre livre que Voyage au bout de la nuit, il rêve de mettre en scène Nord. Il raconte volontiers le film tel qu’il l’imagine : « Une histoire sans chronologie, comme un rêve éveillé, un film sur la fatigue, l’épuisement dit-il. Mais à ce jour il n’a pas écrit de scénario ».

Ces trois projets, malgré leur sérieux apparent, n’étaient pas destinés à aboutir, tant ils étaient pour leurs auteurs des fantasmes destinés à nourrir leur création personnelle.

Les deux dernières tentatives connues se sont elles aussi soldées par des échecs.

François Dupeyron, réalisateur de La chambre des officiers, film assez proche de ce que Céline a pu écrire sur la grande guerre déclarait en décembre 2004 :

« Je travaille seul depuis six mois a l’adaptation du Voyage au bout de la nuit de Céline, avec l’impression d’avoir en permanence une peau de banane sous la semelle. Il est inouï, ce livre : vous découvrez des choses à la dixième lecture, mais vous pouvez aussi rester un mois bloqué sur une scène. Si j’arrive a tourner le Voyage… je ne sais pas si je parviendrais ensuite a réaliser d’autres films. »

En avril 2005, le magazine Le point annonçait que la première version du scénario était terminée. Puis, sans autre explication que « Je n’y suis pas arrivé parce que je n’y suis pas arrivé », Dupeyron abandonne le projet.

Yann Moix, auréolé du succès de Podium, se lance à son tour dans l’aventure, mais en voulant plus s’inspirer du livre que réellement l’adapter, et surtout il envisage de le transposer dans notre époque :

« Je ne prends qu’une partie du roman : la guerre de 14, l’arrivée a New York, l’Afrique. Et, je piquerai ici ou là dans l’ensemble de l’œuvre de Céline. Mais ça se passera de nos jours. Mon Bardamu est un médecin humanitaire, sa guerre se livrera contre le terrorisme dans les tours du World Trade Center le 11 septembre. D’ailleurs cela s’appellera Un voyage au bout de la nuit. »

A son tour, comme ses prédécesseurs, sans donner d’explication a son échec, Moix abandonne.

Il faut donc constater que malgré le nombre de tentatives et les talents réels ou supposés qui s’y sont essayés, les livres de Céline résistent au cinéma, alors que de nombreux textes réputés inadaptables, La recherche du temps perdu, Under the Volcano, Lolita ont été portés à l’écran avec des bonheurs divers.

Des études universitaires ont été menées pour savoir quels textes de Céline se prêteraient le mieux à un traitement cinématographique.

En 1978, Annie Gillain est la première à se poser la question. Au terme de sa réflexion, elle opte pour Féerie pour une autre fois, car Céline y aurait fait le choix de : « L’abandon de la narration propre au roman classique en envisageant son texte comme une parodie du cinéma et de son fonctionnement auprès du public. »

Dans sa communication de 1979 au Colloque de paris, Christine Sautermeister penche pour Casse pipe qu’elle associe à ce qu’elle appelle les « œuvres de caserne », qui ont fait naitre dans l’entre deux guerre un genre très prisé alors, le vaudeville militaire, qui transposé au cinéma a donné des films comme Tire-au-flanc de Renoir (1927), Les gaités de l’escadron de Maurice Tourneur (1932) ou encore Les dégourdis de la 11 eme de Christian Jaque (1937), car, selon elle, le texte : « fourmille de descriptions faisant fonction de véritables indications scéniques, sur les jeux de physionomie, les gestes, les déplacements et même les groupements de personnages » ou de scènes burlesque dignes des Marx Brothers.

Olivier Rucheton en 1991 après avoir complété les travaux des deux auteurs précédents, penche pour Casse pipe dans son mémoire de DEA Approche cinématographique de Casse pipe de Louis-Ferdinand Céline.

Enfin Corinne Chuat en 2002 voit dans Féerie une « tentative de roman multimédiatique ».

On constatera que les chercheurs retiennent deux romans que personne n’a songé à adapter, que les textes présentés par Céline comme des pièces de théâtre, des arguments de ballets, ou même des scénarios ne sont jamais évoqués, pas plus que Voyage, Mort à crédit ou Nord les seuls textes que les cinéastes envisagent d’adapter.

On peut expliquer ce curieux hiatus par le fait qu’après le demi-échec de Mort à crédit Céline prend conscience que la masse ne sait plus ou ne veut plus lire, car le roman, désacralisé, ramené par le marché de l’état d’objet d’art à celui de produit de consommation, est désormais en concurrence directe avec le cinéma. Céline se voit alors contraint d’inventer une forme d’écriture qui puisse entrer en compétition avec l’image. Il lui faut, pour tenter de toucher le lecteur directement « au nerf » comme le fait le cinéma, transformer son style de façon radicale et bousculer les schémas habituels de la narration héritée du roman classique. « Vous écrirez télégraphique ou vous n’écrirez plus du tout ! » prophétisera-t-il un peu plus tard dans la préface de Guignol’s band.
C’est ainsi que Céline abandonne au cinéma la fonction narrative et illustrative jusque-là dévolue au roman. Puisqu’il ne peut plus raconter d’histoires imaginaires, il fait désormais mine d’emprunter à la réalité, parle en son propre nom et simplifie à l’extrême la trame de ses récits : c’est ainsi que l’on peut résumer l’argument de Féerie II à un bombardement de Montmartre par l’aviation alliée en 1944. Il choisit aussi de montrer ses personnages de l’extérieur, supprimant tout commentaire et toute investigation psychologique, les limitant, comme des acteurs de cinéma, à ce que l’on peut voir d’eux : leur enveloppe physique, leurs actes et leurs gestes. Ramenés a la matérialité des corps, ils apparaitront dans les mêmes situations, répétant souvent les mêmes mots. Après Casse-pipe, les dialogues seront réduits au minimum, parfois inexistants. En revanche, avec l’emploi de plus en plus fréquent de l’onomatopée, se met en place un véritable bruitage, une bande son, qui vient « habiller » le récit, à l’exemple des chansons de Féerie I, des brrroum, les vrrrac et les vrang de Féerie II, ou des brangg ! et crrrt !… de Rigodon. Céline se rattacherait ainsi non pas au cinéma muet mais au film sonorisé qui en fut l’apogée, dont le chef-d’œuvre reste Les temps modernes de Chaplin, mélange d’empathie pour les personnages, de sentimentalisme outrancier, de violence et de condamnation du machinisme déshumanisé qui n’est pas sans évoquer certains passages de Mort à crédit.
Par les formes syncopées qu’adopte Céline, l’écriture devient celle de la juxtaposition plus que de la continuité, s’éloignant de la littérature pour se rapprocher du cinéma. Les descriptions se limitent à planter des décors où la couleur n’apparait que rarement : Céline tourne en noir et blanc.

A partir de la trilogie de l’exil, la construction en flash-back des romans chroniques est empruntée à la grammaire narrative du cinéma. Le découpage en séquences se fait par le va-et-vient permanent entre l’Allemagne, où se déroule l’action, et le point fixe du pavillon de Meudon qui abrite le narrateur. Ce dernier, faisant fonction de voix-off, intervient périodiquement afin de recadrer le récit, le rendre plus compréhensible et lui conférer une apparente réalité, puisque, cette voix ne cesse de le répéter, c’est un témoin qui parle. Après Mort à crédit, l’évolution stylistique de Céline, les événements qu’il choisit de raconter, le regard qu’il porte sur eux et l’image qu’il en donne le font balancer, s’il fallait trouver une référence cinématographique, entre la fiction sonorisée inspirée de faits réels (Féerie I et II) et le documentaire commenté (D’un château l’autre, Nord, Rigodon)
Mais, quel serait alors l’intérêt d’adapter Féerie comme le pensent Gillain et Chuat ou Casse-pipe comme le suggèrent Sautermeister et Rucheton ? Ainsi qu’ils le démontrent, ces livres ne sont pas écrits comme des films, ils sont, par les choix esthétiques qui les sous-tendent, déjà des films, conçus pour fonctionner comme une projection dès la lecture. Gide l’avait deviné très tôt en écrivant : « Céline ne décrit pas la réalité, mais l’hallucination qu’elle provoque », une hallucination provoquée par la réalité, voila qui pourrait être une bonne définition du cinéma et du processus qu’il induit dans l’esprit du spectateur. Adapter les romans qui suivent Mort a crédit et sa révolution stylistique ne pourrait aboutir qu’à un pléonasme du texte original.
Au bout du compte, « les professionnels de la profession » dont parle Jean-Luc Godard, ne se trompaient pas : ne serait donc possible au cinéma que Voyage au bout de la nuit première et seule œuvre de Céline se rattachant encore, quoi qu’on en pense, à une forme d’écriture romanesque classique. Cependant, aucune des tentatives n’a abouti. Les raisons qui reviennent le plus souvent pour expliquer ces échecs répétés sont :
*le cout élevé de la production d’un film en costumes.
*la difficulté d’écrire un scenario ne trahissant pas un texte majeur de la littérature contemporaine.
*la nécessité de confier la réalisation à un metteur en scène qui, du point de vue artistique, pourrait se mesurer à Céline (c’est ainsi qu’Audiard envisageait de confier la réalisation du scenario qu’il voulait écrire à partir de Voyage a Fellini).
Or ces obstacles semblent levés ou n’existent pas encore lorsqu’en mars 1933 Abel Gance décide de porter le roman au cinéma :
*le livre est contemporain de la période où il sera tourné et, sauf pour quelques scènes de guerre, il n’est pas nécessaire de recourir a une reconstitution ruineuse.
*on peut envisager une adaptation de Voyage au bout de la nuit qui n’est à cette date qu’un roman à succès parmi d’autres, la postérité ne lui ayant pas encore donne la dimension qu’il prendra, ni la révérence respectueuse qui l’entourera par la suite.
*enfin, Gance est encore reconnu comme l’un des plus grands réalisateurs de son temps. Si parmi tous les projets suscités par Voyage au bout de la nuit un seul aurait du aboutir, c’était bien celui-là.

Mais Céline joue d’emblée de malchance.
Son livre tombe pendant ce que le critique Pierre Jeancolas définit comme « les années médiocres » du cinéma français et qu’il situe entre 1933 et 1935. Les impératifs techniques liés a l’arrivée du parlant font qu’on ne peut plus déplacer les cameras, il faut travailler en plans fixes autour de micros volumineux, peu sensibles, qui, pour des raisons de câblage, doivent être aussi proches que possible des cabines d’enregistrement. C’est pourquoi l’essentiel de la production se réduit à la quasi-captation de pièces de théâtre filmées du point de vue du spectateur assis au milieu du septième rang. Comment imaginer filmer les errances de Bardamu, cet autre « homme aux semelles de vent », à travers un objectif immobile ?
Nous l’avons vu, l’écriture du scenario est confiée a un inconnu, Maurice Norman, qui tire du chapitre de l’arrivée à New York quelques pages médiocres.
Et, surtout, Gance a été artistiquement tué par l’arrivée du cinéma parlant auquel il ne s’habituera jamais vraiment, sa filmographie se réduisant dès lors à une triste dégringolade avec, pour aveu d’impuissance, la sempiternelle reprise de son Napoléon muet dont il donnera trois versions plus ou moins remontées, plus ou moins sonorisées, avec ou sans orchestre philharmonique.
Il faut s’y résoudre, nous ne verrons sans doute jamais (et heureusement) Voyage au bout de la nuit au cinéma. Il n’en reste pas moins, que, depuis Gance, annoncer pour un réalisateur qu’il s’apprête a adapter Céline est une garantie de respectabilité, une médaille qu’il peut s’accrocher à peu de frais. C’est se retrouver immédiatement mis au niveau, assimilé au chef-d’œuvre que l’on prétend mettre en scène.
Cependant, malgré - ou à cause - de l’échec, Céline continuerait de hanter ceux qui voulaient le porter à l’écran, leur servant par la suite de source d’inspiration et l’on retrouverait des traces indirectes de Voyage dans leurs films.
On pourrait citer : la scène du médecin avorteur que joue Pierre Blanchar dans Un carnet de bal (1937) de Julien Duvivier. La scène du café de La Traversée de Paris (1956) de Claude autant-Lara et sa célèbre réplique : « salauds de pauvres ! ». Certaines séquences du médiocre Les chinois à Paris de Jean Yann qui paraissent directement recopiées de passages de Rigodon.
Ce ne sont là que quelques choix personnels, donc discutables. Chacun pourra à son tour, en s’amusant à ce petit jeu cinéphilique, retrouver au gré de ses lectures et de ses goûts, la séquence ou le film qui lui parait prendre source dans tel ou tel roman de Céline. Voici, pour exemple, l’opinion d’un autre admirateur de Céline, Jacques Tardi :
« […] on peut considérer que le film a été fait, et que l’on retrouve des adaptations du Voyage au bout de la nuit dans de multiples séquences de plusieurs petits films. Si l’on regarde bien certains films, l’influence de Céline est perceptible. Dans Panique de Duvivier, il y a une place avec des forains et un "stand des nations", comme dans le Voyage au bout de la nuit. Dans Les portes de la nuit, il y a des scènes qui se passent en banlieue, on retrouve la mesquinerie des gens… Idem dans Pépé le moko et Carnet de bal, qui ont des ambiances très céliniennes. Si l’on met bout a bout ces extraits de film, on retrouve l’œuvre de Céline. »
C’est sans doute pourquoi Sergio Leone a pu dire : « J’ai fait Il était une fois l’Amérique, je n’ai plus besoin de tourner Voyage au bout de la nuit ».

Mais, si toutes les tentatives cinématographiques ont échoué, nous avons pourtant été tout près de voir une adaptation de Voyage au bout de la nuit. Jacques Tardi, après avoir donné sa remarquable interprétation de Brouillard au pont de Tolbiac de Léo Malet s’est attaqué à l’illustration de trois livres de Céline : Voyage au bout de la nuit (1988), Casse pipe (1989) et Mort à crédit (1991) publiés chez Futuropolis. Issu d’un milieu de petits commerçants proche de celui où naquit Louis Destouches, grand amateur de l’écriture de Céline, obsédé par la guerre de 14, capable comme personne de reconstituer en trois traits l’ambiance cafardeuse de la banlieue de l’entre deux guerre, Tardi semblait être celui qui pouvait le mieux réaliser cette transposition infiniment délicate, tant son empathie avec les personnages inventés par Céline est grande. Pourtant, Tardi n’a pas osé adapter le texte et faire parler les personnages, se contentant d’illustrer de façon qu’il qualifie lui même de « redondante » les trois ouvrages sur lesquels il a choisi de travailler. Nous continuerons de penser que Tardi a eu tort d’avoir reculé, de ne pas avoir réalisé sa propre mise en scène de Voyage au bout de la nuit en bande dessinée. Il aurait certainement trahi Céline, déplu à nombre de ses admirateurs, et contrairement à ce qu’il en pense, le résultat n’aurait pas été « nettement moins bon que l’original », il aurait été autre. En effet et par définition, toute adaptation d’un texte, si grand qu’il soit, ne doit-elle pas être une trahison assumée ?
De tous les échecs rapportés ici, celui qui laisse le plus de regrets est certainement ce dernier. On ne peut que rêver à l’extraordinaire adaptation que Tardi aurait pu faire de Voyage au bout de la nuit de Céline.

Émile BRAMI

6 juin : une soirée Céline réservée aux lecteurs - Lire - mai 2011

Invitée à s’associer au 30è anniversaire de la Société civile des auteurs multimédia, la rédaction de Lire a reçu « carte blanche ». En foi de quoi elle propose à ses lecteurs d’assister le lundi 6 juin à 19h au siège de la SCAM, 5, avenue Vélasquez à Paris (VIIIè) à la projection des derniers entretiens de Louis-Ferdinand Céline (avec Louis Pauwels, Pierre Dumayet, André Parinaud). En présence de biographes et spécialistes de l’œuvre de l’écrivain, le plus passionnément blâmé de sa génération, disparu il y a cinquante ans, le 1er juillet 1961 à Meudon. Le nombre de places est limité.

Pour s’inscrire, prière toutefois de ne se manifester qu’à partir du 15 mai soit par courriel (svideau@lexpress.fr), soit par courrier : Lire – « Carte blanche du 6 juin », 29, rue de Châteaudun, 75308 Paris Cedex 09.

Lire
, mai 2011.

mercredi 27 avril 2011

Vient de paraître : La Bastoche, une histoire du Paris populaire et criminel de Claude Dubois

Vient de paraître aux éditions Perrin La Bastoche, une histoire du Paris populaire et criminel de Claude Dubois, déjà auteur de l'excellent Je me souviens de Paris (Parigramme, 2007) ou encore de Ca, c'est Paris ! Les chroniques de Titi du Figaroscope (2005). Y sont notamment évoqués Céline et Henri Mahé à propos du "Balajo", de sa décoration et de son inauguration il y a maintenant 75 ans. A lire!

Présentation de l'éditeur
Qui ne sait qu’à la Bastille, autour de la colonne révolutionnaire, faubourg Saint-Antoine, on a dansé musette au son de l’accordéon ? En dénommant « Bastoche » la Bastille des rues borgnes et des bals, l’argot parisien a fait preuve d’un instinct très sûr. De fait, l’ouvrage de Claude Dubois est un livre d’histoire populaire, mâtinée voyou par nature, la marque de fabrique de Paname et de sa culture. En nous entraînant dans les recoins obscurs ou hauts en couleur du quartier de la mistoufle, des gros bras et des gueules d’amour, il rend vie à deux siècles (1750-1940) de comédie urbaine aujourd’hui séculaire, dont les échos de valses et de javas résonnent encore dans la mémoire de Paris et d’ailleurs.

L'auteur
Historien élève de Louis Chevalier, journaliste et chroniqueur, Claude Dubois est l’auteur de plusieurs ouvrages sur le Paris d’autrefois, dont Paris Gangster et Je me souviens de Paris.

Claude Dubois, La Bastoche, une histoire du Paris populaire et criminel, Ed. Perrin, 2011.
Commande possible sur Amazon.fr.

mardi 26 avril 2011

Louis-Ferdinand Céline : Mort à crédit au théâtre Essaïon à Paris du 15 septembre au 30 décembre 2011

Le théâtre Essaïon (6 rue Pierre au lard, Paris 4è) accueillera le spectacle d'Eric Sanson tiré de Mort à crédit du 15 septembre au 30 décembre 2011. Nous avions déjà évoqué ce spectacle à l'occasion de ses représentations bordelaises à travers deux articles que vous retrouverez ici et .

Interprété par Eric Sanson, mise en scène Renaud Cojo, lumières Jean-Pascal Pracht.

http://sansonmortacredit.blogspot.com

L’extrait théâtralisé du roman «Mort à Crédit» de Louis - Ferdinand Céline nous ramène au temps de son enfance : son apprentissage chez Courtial des Pereires, une sorte de Léonard de Vinci de la fumisterie scientifique, qui d’abord subjugue son secrétaire assistant trésorier pour le décevoir ensuite comme tout le monde. Au service du Directeur du Génitron le périodique favori des petits inventeurs-artisans de la région parisienne, Ferdinand connait simultanément la gêneet la liberté, le labeur intense et le loisir, le vagabondage et l’instruction.



Théâtre Essaïon
6 rue Pierre au Lard
75004 Paris

Du 15 septembre au 30 décembre 2011.
Tous les jeudi, vendredi et samedi à 20h00.
Relâche le 24 décembre 2011.
Durée du spectacle 1h00.
Métro : Hôtel de Ville - Rambuteau

Réservation au 01 42 78 46 42
www.essaion.com

David Alliot à la librairie La belle lurette le jeudi 28 avril à 19h

David Alliot signera son dernier livre D'un Céline l'autre (Ed. Robert Laffont) à la librairie La belle lurette le jeudi 28 avril 2011 à 19h.

Librairie La belle lurette
26 rue Saint-Antoine
75004 Paris
01.42.72.41.76
librairie@labellelurette.fr


www.labellelurette.fr

lundi 25 avril 2011

Le Petit Célinien - Lettre d'actualité n°6

Pour recevoir gratuitement par courriel à chaque parution la lettre d'actualité du Petit Célinien, laissez-nous votre mail à l'adresse habituelle : lepetitcelinien@gmail.com.

Le Petit Célinien - Lettre d'actualité n°6.

dimanche 24 avril 2011

Le masque et la plume - France Inter - 24/04/2011

Jérôme Garcin et son équipe de critiques (Olivia de Lamberterie (Elle), Arnaud Viviant (Regards), Nelly Kapriélian (Inrockuptibles) et Jean-Louis Ezine (Nouvel Observateur) évoquent en fin d'émission la sortie du livre de David Alliot D'un Céline l'autre :

Christophe Malavoy - La traversée du miroir - France 5 - 24/04/2011

Invité de l'émission de Patrick Poivre d'Arvor, La traversée du miroir, diffusée ce dimanche 24 avril 2011 sur France 5, Christophe Malavoy évoque (rapidement) ses projets sur Louis-Ferdinand Céline :

Henri Mahé, Louis-Ferdinand Céline : une amitié par Eric Mazet

Henri Mahé a vingt-deux ans lorsqu’il rencontre le futur Céline. Peintre des cirques et des maisons closes, c’est sur sa péniche, que se mélangent voyous, avocats, écrivains, maquereaux, étudiants, chansonniers, danseuses et artistes de cinéma. Fasciné par cette vie de bohème, Céline fera de Mahé l’un des personnages de Voyage au bout de la nuit. Mahé écrira deux livres dans lesquels il se servira des lettres de Céline : La Brinquebale avec Céline, paru en 1969, et salué comme un témoignage unique sur l’univers célinien, et La Genèse avec Céline, suite de souvenirs émaillés de lettres reçues du Danemark, demeuré inédit jusqu’à ce jour.

[Photo : Henri Mahé devant la fresque peinte pour Le Moulin Rouge (Collection Eric Mazet)]«Un homme jeune que c’était, le patron, un fantaisiste. Il aimait les bateaux qu’il nous a expliqué encore… […] Le patron de la péniche, je l’ai examiné de plus près, il devait bien avoir dans la trentaine, avec des beaux cheveux bruns poétiques. […] C’était un artiste le patron, beau sexe, beaux cheveux, belles rentes, tout ce qu’il faut pour être heureux ; de l’accordéon par là-dessus, des amis, des rêveries sur le bateau… »
Quand le docteur Destouches écrit ces lignes dans Voyage au bout de la nuit, dans la séquence consacrée à Saint-Jean, aux environs de Toulouse, il évoque le peintre Henri Mahé, dont il a fait la connaissance en septembre 1929, sur une péniche, La Malamoa, amarrée à Croissy-sur-Seine. Né à Paris en 1907, maniant l’argot de la Mouff’, après un stage à la comptabilité des Galeries Lafayette, Henri Mahé avait suivi les cours des Beaux-arts et s’était marié avec une pianiste. Ses camarades d’atelier n’oublieront jamais ses réparties truculentes et son vocabulaire imagé. Dès 1926, il expose au Salon d’Automne le portrait du marquis d’Arcangues, illustre un roman d’André Doderet, grand ami de Giraudoux et de Morand, expose à la galerie de Marie-Paule Lapauze, épouse de Pomaret, le futur ministre. Une carrière de peintre mondain s’ouvre à lui. Artistes et bourgeois, célébrités défilent sur La Malamoa, respirer l’air de la bohème, écouter le peintre. Mais Mahé préfère déjà fréquenter les cirques, saisir sur le vif les Fratellini ou le clown Beby. Et deux événements vont décider de son avenir. Maurice Dufrène, rénovateur de l’art décoratif, propose à Mahé d’exécuter des fresques dans une maison close : le 31, Cité d’Antin. Puis, Germaine Constans et Aimée Barancy emmènent sur la péniche un médecin curieux, le docteur Destouches. Malgré leur différence d’âge – l’un avait 22 ans et l’autre 35 – « il fallait qu’ils se rencontrent ». Des passions en commun : Villon et Bruant, les bateaux, les chansons de marins, les récits de corsaires, les perfections physiques, l’apesanteur des acrobates, la rêverie bretonne…
« Notre première rencontre ? De sa voix graillonnante : “L’Art aux chiottes !… les artistes, c’est des révolutions en puissance… […] Des roses au cimetière, à quoi ça sert ? à la branlette de l’asticot !” […] Tous les jours nous déjeunions ensemble, soit au claque avec les filles, soit… au Café de la paix !… […] Nous dînions tous les soirs chez Manière, rue Caulincourt, avec le précieux Giraudoux… […] Quand Abel Gance nous rencontrait, il ne manquait jamais de dire : “Tiens ! voilà Verlaine et Rimbaud !” Te casse pas la tête, les gens n’entravaient rien à notre délire… On pouvait prendre comme sujet un petit pois, “c’est un légume bien tendre”, et rouler pendant une heure sur ses propriétés gastronomiques, sensuelles, politiques et philosophiques… l’auditoire n’aurait pu placer un blady mot… souriant à retardement à notre musique abstraite…» (Extraits de lettres d’Henri Mahé à Éric Mazet.)

Amitié
Une amitié s’instaure donc. Elle allait durer vingt ans, prenant parfois l’aspect de commediadell'arte, mais jamais défaillante. Mahé décore de fresques le cinéma Rex en 1932, le Balajo en 1936, le Moulin Rouge en 1951, ces temples parisiens, s’achète un bateau, L’Enez Glaz, sillonne les mers de Bretagne, reçoit le prix Blumenthal de décoration en 1934, fait les décors de quatre films d’Abel Gance entre 1938 et 1942, écrit un roman sur le Milieu (resté inédit), met au point le « Simplifilm », un procédé de trucage cinématographique, dirige Blondine, son propre film, en 1944, est exclu des studios Saint-Maurice à cause de son amitié pour Céline, divorce et se remarie, revient à la peinture de chevalet en 1945, mais refuse de passer par les galeries. « Grosse bataille, petit butin… », comme le chantait Céline.
En 1949, comme peu d’amis fidèles, Mahé se rend au Danemark, à la demande de Céline, esquisse son portrait, essaie de lui rallier des partisans. À Paul Marteau, en juillet 1949, Céline recommande Mahé en ces termes : « Je viens de recevoir la visite ici, d’un admirable ami et admirable peintre – Henri Mahé – français, breton et parisien. […] Vous l’aimerez tout de suite, j’en suis persuadé : un artiste et un coeur généreux. » La brouille intervient en 1950, quand Céline lit dans Crippled Giant de Milton Hindus que Mahé a dit à l’universitaire américain : « Oh ! vous savez, Céline est un peu menteur ! » Les deux amis ne se reverront qu’une fois à Meudon en 1951 et la visite se soldera par un échec, Mahé s’adressant au vaillant Céline d’autrefois, et Céline endossant son rôle de vaincu, ayant connu la prison et l’exil.
Quand je connus Henri Mahé en 1956, il disait toujours « mon ami Céline », sans se soucier des opinions du visiteur, qu’il fut le colonel Rémy ou Rémy Cooper, l’un des fondateurs d’Israël. La guerre, les mariages et divorces, avaient fait s’éclater la joyeuse bande de La Malamoa et de L’Enez Glaz, mais certains fidèles fréquentaient encore l’atelier du 31, rue Greuze, pour se griser du verbe de Mahé. Je ne fus pas le seul, vers 1966, à dire à Mahé : « Toi qui a connu le monde des cirques, des bordels, du Milieu, du cinéma, des acteurs, des marins, tu devrais écrire tes mémoires, et parler de Céline ! »
De son côté, le colonel Camus lui écrivait : « Vous avez connu des drôles de gens, des drôles de vies… l’époque des bateaux sur la Seine… […] Et ces étonnants personnages : Céline, Cotton, Paulette. […] C’est loin, le déluge ! hier pourtant… […] Mahé est toujours Mahé. Un Viking… […] Camaret, que de souvenirs ! Vous les conterez un jour, dans un chapitre, “À bord de L’Enez Glaz”. […] Cher Enez Glaz ! c’était notre enfant. Il faut nous conter son histoire. Bientôt il sera trop tard. Plus de témoin… […] Votre lettre. Annoncée. […] Magnifique la lettre. Superbe de ton, d’allure. Mahé vivant ! On croit l’entendre. Le langage parlé passe dans l’écriture. Ainsi voulait Céline. Il l’a fait. Fallait le faire. Révolution ! […] Génie ! Il faut le redire. Céline seul est grand. Il a transposé. C’est son talent. Quel talent. Et son travail. Quel travail ! De la dentelle… Il a filé le son… de la musique. Et quelle musique ! “Du Bach lancinant et subtil…” dixit Mahé. Bien vu, bien dit. Et de la Poésie ! Faut la voir aussi. Plaignons qui ne la pas vue, sentie. Mais quel boulot, exténuant ! Il a trimé, ramé sans cesse. Forçat ! Travail en finesse… Sa mère était dentellière. Et son travail en force. La rame du galérien. Il s’y est épuisé. […] Ce Titan était un patient, minutieux orfèvre. […] Mais il y eut un temps où pour se recharger, il descendait “au bateau” écouter Mahé. C’était le temps des grandes gueules. Il en est demeuré des échos. Très mystérieux pourtant, déjà, ce curieux Dr Destouches qui rentrait vite en son “guignol” pour transposer. Je crois qu’il faut lui garder son mystère. Sa grandeur est au-delà des péripéties de sa vie mouvementée. Il en a dit ce qu’il voulait dire. Il a brouillé les pistes. Tout grand écrivain est un grand menteur… » (Extraits de lettres de Clément Camus à Henri Mahé.)

[Illustration d'Henri Mahé pour Voyage au bout de la nuit (Coll.Eric Mazet)]
Mémoires

En écho à une centaine de lettres que Céline lui avait adressées, Mahé entreprit donc la rédaction de ses mémoires. Ainsi prit forme La Brinquebale avec Céline. Peu de livres alors étaient consacrés à Céline. Les études de Vandromme, d’Hanrez et de Nicole Debrie étudiaient plus l’art poétique de Céline que sa biographie. L’édition des romans en Pléiade apportait quelques références ainsi que les deux numéros de la revue L’Herne. Mais pas de biographie véritable. Quelle vie pourtant ! Et malgré les transpositions, à la source des oeuvres. Mais qui était Céline, masques ôtés, le docteur Destouches ? Hors théâtre, dans la vie ? Seuls les souvenirs et les lettres guidaient Mahé dans sa rédaction. La Brinquebale avec Céline parut en 1969. La signature eut lieu au Moulin Rouge. Pascal Pia et Paul Chambrillon saluèrent l’ouvrage qui révélait un Céline méconnu : plus cultivé, amusant, attentif, bretonnant, solitaire, qu’on ne le disait souvent. On en redemandait. Les souvenirs et les lettres s’arrêtaient au départ de Céline vers le Danemark.
Parti peindre au Mexique des fresques en hommage à Lautrec, puis installé à New-York, tout en dédiant une toile à Don Quichotte, Mahé travaillait à la suite, sur la correspondance du Danemark, une quarantaine de lettres, ébauchant le portrait d’un Céline mystique et sceptique, interrogeant les mystères de la création, menacé dans sa vie par les victimes de sa révolte, effrayé par l’agressivité de l’homme, ses mensonges, son orgueil, son penchant destructeur… D’où le titre choisi pour le second volume : La Genèse avec Céline. Mais la faucheuse rompit les amarres. « Les cimetières sont pleins de rêves inachevés. » Mahé s’embarqua au long cours, le 20 juin 1975, sur le trois mâts de ses rêves. Depuis 1969, La Brinquebale était un navire-fantôme, et La Genèse était restée à quai. Les voici réunies, illustrées, annotées, pour un départ nouveau, « chacun goualant dans sa mâture ». !

Eric MAZET
Magazine des Livres - n° 30 - mai 2011

A écouter : 


Henri Mahé, La brinquebale avec Céline suivi de La Genèse avec Céline, Ed. Ecriture, 2011.
Pré-commande possible sur Amazon.fr.

Lire Céline aujourd'hui - Conférence de Philippe Sollers - 10 mars 2011

"Lire Céline aujourd'hui", séminaire doctoral de Julia Kristeva à l'Université Paris Diderot - Paris 7. Conférence de Philippe Sollers à voir sur :

Louis-Ferdinand Céline - A paraître (6 mai 2011) : Céline entre haines et passion de Philippe Alméras

Les éditions Pierre-Guillaume de Roux rééditent la biographie de Philippe Alméras Céline entre haines et passion. Sortie le 6 mai 2011.

Commande possible sur Amazon.fr.

Louis-Ferdinand Céline - A paraître (juin 2011) : Céline l'infréquentable de Joseph Vebret

A paraître aux éditions Picollec Céline l'infréquentable de Joseph Vébret. Préface de Jean-Marie Rouart de l'Académie française.

Pré-commande possible sur Amazon.fr.

samedi 23 avril 2011

Louis-Ferdinand CÉLINE & Michel AUDIARD : "mousse et pampre"

"Le genre réservé [...] mousse et pampre." Tout le monde connaît cette réplique. Tout le monde la comprend - Blier insiste sur son extrême délicatesse pour mieux souligner la grossièreté d'Antoine à son égard.
Pourtant, preuve du génie d'Audiard, personne ne sait ce qu'est le pampre ni d'où sort cette expression. Le pampre est certes une tige de vigne portant ses feuilles, ses vrilles et, souvent, ses grappes de raisin. Mais non, l'affaire n'a rien à voir avec l'alcool comme certains l'imaginèrent - mousse renverrait à la bière et pampre à la vigne - ce qui serait peu compatible avec le contexte. (Blier ne se vante pas d'être alcoolique !)
Tout vient sans doute de l'admiration d'Audiard pour Céline, de sa bonne mémoire et de sa lecture de Guignol's band dans lequel on trouve : " Je possède tous ses écrits de grand-père, ses liasses, ses brouillons, des pleins tiroirs ! Ah ! Redoutables ! Il faisait les discours du préfet, je vous assure dans un sacré style ! S'il l'avait l'adjectif sûr ! S'il la piquait bien la fleurette ! Jamais un faux pas ! Mousse et pampre ! " On n'ira pas jusqu'à affirmer que Céline a dialogué Les Tontons flingueurs, mais quand même...

Stéphane Germain, Le dico flingueur des Tontons, Ed. Hugo & Cie, 2011.
Commande possible sur Amazon.fr.

Sur le sujet:
>>> Le Petit Célinien n°13 - Spécial Michel Audiard

vendredi 22 avril 2011

Louis-Ferdinand Céline - A paraître le 20 mai 2011

Présentation de l'éditeur
Est-il possible d’évoquer Louis-Ferdinand Céline sans faire jaillir toutes les passions désordonnées liées à la controverse des écrits de cet auteur hors du commun, qui aura marqué, quoiqu’il advienne et qu’on le veuille ou non, la littérature du XXe siècle ?

Cinquante ans après sa mort, Louis-Ferdinand Céline divise toujours et crée la discorde. Provocateur infatigable, poète indésirable et cependant illuminé, homme libre et accusé de l’être, que dirait aujourd’hui Céline dans notre société moderne, standardisée, mondialisée, où règne en maître l’individualisme, le mensonge, l’intérêt et le profit ? Lui, le « prophète » qui annonçait déjà dans ses pamphlets les 35 heures, le salaire minimum, les « pavillons Borloo », la télé-réalité ou la Star Academy, que penserait-t-il de notre paysage social, économique, politique et culturel ? Comment réagirait-il à cette mise à l’écart dont il est encore la victime et la cible ? Serait-il blessé de ne pas être célébré ou commémoré ?

Écrit sur le principe platonicien du dialogue, Céline, même pas mort ! fait revivre l’auteur du Voyage au bout de la nuit et tente de faire entendre la modernité autant que les contradictions d’un homme qui fut toujours seul, conscient dès la tragédie de la Guerre de 14 - il avait alors tout juste vingt ans - d’être sous l’immense empire de la mort. Au-delà du portrait intime de Céline et de sa femme Lucette Destouches avec laquelle l’auteur s’entretient régulièrement, l’ouvrage se présente aussi comme une réflexion sur la nécessité de dire, non pas la vérité officielle, bien-pensante, accréditée, politiquement correcte, mais celle qui, au plus profond de nous, forge nos différences et nos tempéraments. Céline, même pas mort ! ne plaira pas à tout le monde. Mais n’est-ce pas au fond, ce qu’on peut lui souhaiter de mieux ?

Christophe Malavoy, Céline même pas mort !, Ed. Balland, 2011.
Pré-commande possible sur Amazon.fr.


Christophe Malavoy prépare une pièce de théâtre et un long-métrage sur Céline, avec dans le rôle de l’écrivain Jacques Dutronc et dans celui de Lucette, Anouk Grinberg. Christophe Malavoy est acteur et réalisateur. Il a notamment tourné avec Michel Deville, Claude Zidi ou encore Yves Boisset.Il a également publié D’étoiles et d’exils, Parmi tant d’autres et À Hauteur d’Hommes.

Vente aux enchères de manuscrits de Louis-Ferdinand Céline le 10 mai 2011 à Paris

Le mardi 10 mai à 14h30 est organisée par la maison Briest-Poulain-Tajan à l'Hôtel Marcel Dassault (7, Rond-Point des Champs-Élysées Paris 8è) une vente aux enchères de manuscrits et livres anciens. De très nombreux manuscrits de Louis-Ferdinand Céline seront mis en vente: correspondance inédite au Docteur Alexandre Gentil, lettres à Aimée Barancy, Théophile Briant, Blanchette Fermon, Jeanne Le Gallou, Thorvald Mikkelsen, John Marks, André Parinaud ou encore un portrait de Céline d'Eliane Bonabel, un dessin de Céline et son Mémoire en défense de 1946.

Tout les détails sur le catalogue de la vente (extrait) à télécharger ici. (Lot 183 à 211).
Les résultats ici.

jeudi 21 avril 2011

Colloque international «Céline à l'épreuve» les 25, 26 et 27 mai 2011 à Paris et Nantes

TLI-MMA (Université de Nantes), Ecritures de la modernité (Sorbonne Nouvelle- Paris-III), Centre de recherche sur les arts et le langage (CNRS-EHESS) organisent un colloque international consacré à Louis-Ferdinand Céline les 25, 26 et 27 mai 2011 à Paris et Nantes. Voici le programme de ces 3 journées.

Université de Paris-3
Maison de la Recherche, 4 rue des Irlandais, Ve ardt.
Mercredi 25 mai (matin)
Président de séance : Alain Schaffner

9h30 : Henri Godard (Université de Paris IV) : « Autour d’une biographie »
10h : Régis Tettamanzi (Université de Nantes) : « Bilans critiques »
10h30 : pause
11h : Cécile Leblanc (Université de Paris III) : « La correspondance Céline-Mondor »
11h30 : Alexandre Seurat (Université de Paris III) : « Céline face à l’hystérie »

Mercredi 25 mai (après-midi)
Président de séance : Alain Cresciucci

14h : Odile Roynette (Université de Besançon) : « Céline combattant : une lecture historienne »
14h30 : Jérôme Meizoz (Université de Lausanne, Suisse) : « Pseudonyme et posture chez Céline »
15h : pause
15h30 : Gisèle Sapiro (CNRS, EHESS) : « La figure de l’écrivain irresponsable »
16h : Philippe Roussin (CNRS, EHESS) : « Sartre : Céline ou Genet »

Jeudi 26 mai (matin)
Président de séance : Philippe Roussin

9h : Catherine Rouayrenc (Université de Toulouse-II) : « De la phrase à l’énoncé oral : une désarticulation progressive »
9h30 : Alain Schaffner (Université de Paris III) : « La tension narrative dans les premiers romans de Céline »
10h : pause
10h30 : David Décarie (Université de Moncton, Canada) : « Métaphores et inconscient : de l’émotion célinienne au tropisme sarrautien »
11h : Alain Cresciucci (Université de Rouen) : « Céline et le cinéma »

Jeudi 26 mai (après-midi)
Président de séance : Philipp Watts

14h : Yoriko Sugiura (Université de Kobé, Japon) : « Perte et deuil dans Mort à crédit »
14h30 : Tonia Tinsley (Université du Missouri, USA) : « Virginie, l’épreuve féerique du féminin célinien »

Université de Nantes
Vendredi 27 mai (matin)
Bâtiment Censive, salle 4046
Président de séance : Régis Tettamanzi

10h : Gaël Richard (La Roche-sur-Yon) : « Céline et le mouvement breton »
10h30 : Sonia Anton (Université du Havre) : « L’apport des lettres inédites »
11h : Jean-Paul Louis (éditeur) : « L’édition de la correspondance de Céline : état des lieux »

Vendredi 27 mai (après-midi)
Bâtiment Censive, salle de conférences
Présidente de séance : Anne Roche

14h : Anne Roche (Université de Provence) : « Succession ouverte ? »
14h30 : Philipp Watts (Université de Columbia, USA) : « Une nouvelle littérature du mal ? »
15h : pause
15h30 : Table ronde : l’influence de Céline sur la littérature française contemporaine : Mickaël Ferrier (écrivain), Hédi Kaddour (écrivain), Yves Pagès (éditeur, écrivain)
17h-18h : Lecture-spectacle par Thierry Pillon (Voyage au bout de la nuit)


Organisation:
Philippe ROUSSIN, Centre de recherche sur les arts et le langage (CNRS-EHESS)
Alain SCHAFFNER, Ecritures de la modernité (Sorbonne Nouvelle- Paris-III)
Régis TETTAMANZI, TLI-MMA (Université de Nantes)

Les loupés historiques de Gallimard

Le site de L'Express publie un article de Jérôme Dupuis sur les "loupés historiques de Gallimard". Six ratages sont présentés. Parmi eux, celui de Céline:

Les faits. Début avril 1932, le docteur Louis Destouches dépose un manuscrit dactylographié de 700 pages chez Gallimard. Dans la lettre qu'il y joint, il écrit : "C'est du pain pour un siècle entier de littérature. C'est le prix Goncourt 1932 dans un fauteuil..."

Le ratage. On attribue au manuscrit le n° 6127. Au comité de lecture du 24 juin, Benjamin Crémieux, pilier de la maison, rend son jugement : "Roman communiste contenant des épisodes de guerre très bien racontés. Ecrit par moments en français argotique un peu exaspérant, mais en général avec beaucoup de verve. Serait à élaguer." Rendez-vous est pris en ce sens. Mais, à force de traîner, Gallimard se fait damer le pion par Robert Denoël, qui, lui, a dévoré le roman en une nuit.

Le rattrapage. Après la parenthèse de la guerre et de son exil au Danemark, Céline est libre de se trouver un nouvel éditeur, en 1951. Le 26 mai, déjà, André Malraux alerte Claude Gallimard, fils de Gaston : "Je crois que Céline a une grande envie de passer chez vous. Si c'est sans doute un pauvre type, c'est certainement un grand écrivain." Le romancier signe en effet le 18 juillet. Il se montre intraitable et obtient des droits d'auteur records de 18 % ! Son mot d'ordre : "Cash et la Pléiade !" Il entrera en effet dans la prestigieuse collection, en 1962. Au fil des ans, il entretiendra une savoureuse correspondance avec le "désastreux épicier" Gaston Gallimard. Qui donnera lieu à un gros volume. Publié chez Gallimard, cela va de soi.

Jérôme DUPUIS
L'Express.fr, 20/04/2011

Louis-Ferdinand Céline, d’une folie l’autre. Littérature et prescription de l’écart social et politique

Le site www.medersa-champs.com (Psychopatologie et clinique sociale) propose un article d'une quinzaine de page d'Abdellali Merdaci intitulé "Louis-Ferdinand Céline, d’une folie l’autre. Littérature et prescription de l’écart social et politique." A télécharger (pdf) ici.

mercredi 20 avril 2011

Lorànt Deutsch a rendez-vous avec Céline

Lorànt Deutsch va tourner, pour la chaîne Histoire, un documentaire sur le Paris de Céline, du passage Choiseul à la barrière de Meudon, en passant, bien sûr, par Clichy et Montmartre. Diffusion prévue en octobre. Une idée de Patrick Buisson, qui dirige cette chaîne thématique. Fabrice Luchini avait été envisagé, mais c'est finalement l'auteur de Métronome (Ed. Michel Lafon) qui va se charger de "faire le guide".

L'Express.fr, 20/04/2011.