Invité par les organisateurs de la Foire du livre de Brives le 11 novembre pour présenter son livre, Céline même pas mort ! (Balland, 2011) et animer une rencontre-lecture des textes du même Céline, l'acteur et écrivain Christophe Malavoy a répondu aux questions de Blandine Hutin pour La Montagne :
Pourquoi un livre sur Céline ?
Pour
 lutter contre les idées reçues, injustes pour lui ou d'autres. Comme 
lui est un provocateur, il a produit le pire ; il a attaqué beaucoup, 
l'armée, l'église… C'est aussi un homme libre, qui a toujours défendu sa
 liberté de pensée. Mais il a aussi produit le meilleur, on a tendance à
 l'oublier. 
Est-ce un essai de réhabilitation ?
J'essaie
 d'ouvrir un peu les yeux sur son 'uvre. Ce serait dommage de réduire 
Céline à ses pamphlets. Et j'essaie de comprendre l'homme, sa 
souffrance. La Première Guerre mondiale est le terreau de toutes ses 
douleurs, qu'il a cumulé après dans l'exil, en Afrique… Il était dans un
 état de délabrement ! Il faut comprendre le choc que cette guerre a 
été, dans sa chair ; il a frôlé la folie de ne plus pouvoir dormir. On 
peut alors devenir très méchant. 
J'essaie aussi d'élargir le champ de 
vision. Par exemple, Céline adorait la danse, qui est pour lui la 
quintessence de l'art. Il aurait voulu écrire des ballets. C'est un peu 
le drame de sa vie, le rejet de ses ballets ; c'est à ce moment qu'il 
s'est mis à écrire des horreurs. Je crois que sa trajectoire aurait été 
très différente s'il avait pu s'épanouir dans ses ballets. D'ailleurs, 
il projetait d'écrire un livre sur la danse, il n'a pas eu le temps… 
Qu'est-ce qui vous touche chez Céline ?
Je
 suis de plus en plus séduit par son audace littéraire, son délire, sa 
liberté d'invention en matière de grammaire, d'orthographe. Sa poésie, 
son imaginaire débordant d'une grande tendresse. Il a regardé le monde 
sans complaisance et il s'est un peu brûlé les ailes à le décrire tel 
qu'il le voyait. 
Comment avez-vous travaillé pour percer Céline à jour ?
Je
 connais bien Lucette Destouches, sa veuve, le pavillon de Meudon ; je 
suis rentré dans le cercle très fermé des Céliniens. J'ai lu sa 
correspondance et tout ce qu'on a écrit sur lui ; je connais bien le 
bonhomme ! Après, comme dans le travail de comédien, il y a une intime 
conviction. On se rapproche de lui, à force de l'imaginer, on arrive à 
s'immiscer dans une intimité. Cest un peu étrange, on a l'impression que
 la personne vous parle… 
Vous allez le lire sur la Foire du livre. Comment lit-on Céline ?
Il
 y a une musique, un rythme Céline. Il faut arriver à transmettre 
l'émotion. Il y a une incidence entre sa passion de la danse et son 
écriture ; il faut faire entendre sa musique avec la voix. Céline, c'est
 un langage parlé, émouvant ; celui de quelqu'un qui confie. C'est 
composé, mais l'écriture reste très charnelle. Elle va directement 
toucher à notre chair.
Tout le monde peut-il rencontrer Céline ?
Ce
 n'est pas un auteur facile, mais il y a dans ses livres des passages 
d'anthologie… Je trouve ça dément qu'on ait un auteur aussi prodigieux 
et qu'on le relègue. Tout le monde le condamne, mais beaucoup s'en sont 
inspirés. Il aurait un regard intéressant. C'était un visionnaire, un 
homme intelligent, cultivé ; une réflexion qui met en garde, qui essaie 
d'éclairer les consciences. C'est toujours intéressant d'écouter les 
gens comme lui. 
Propos recueillis par Blandine HUTIN
La Montagne, 6 novembre 2012.
A lire :
> « Christophe Malavoy déraille », e-gide.blogspot.fr, 12 novembre 2012.
> Les Entretiens du Petit Célinien (IV) : Christophe MALAVOY

 
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