lundi 18 avril 2011

Emile Brami : « Après la guerre, Céline n’a jamais manifesté le moindre regret »

Romancier et biographe de Céline et désormais directeur éditorial de L’Editeur, Emile Brami décortique l’antisémitisme de Céline. Une haine des Juifs que l’on retrouve aussi bien dans son oeuvre littéraire que dans ses actions en tant que collaborateur.


Actualité Juive : Pourquoi l’antisémitisme de Céline était-il si virulent ?

Emile Brami : A mon avis, pour quatre raisons. Céline est né l’année où commence l’affaire Dreyfus et il a été élevé dans une famille de commerçants appartenant à la petite bourgeoisie parisienne, terrorisés par l’arrivée de la grande distribution. Ils imaginaient que cette grande distribution était entre les mains des Juifs et que leur faillite, leur malheur, viendrait d’eux. La seconde raison est que le père de Céline était profondément antisémite. La fille de Céline m’a plus tard raconté que les repas de famille se terminaient par une sorte de partie de ping-pong entre le père et le fils sur les Juifs. Troisième raison : Céline, qui était médecin, se voulait médecin-hygiéniste. Pour lui, comme très souvent à l’époque, la question des races était une question extrêmement importante. Il dit d’ailleurs dans un texte ne rien avoir contre les Juifs, à condition qu’ils restent entre eux et qu’ils ne se mélangent pas au reste de la société. Dernière raison, le fait que Céline était un pacifiste. Il avait fait la guerre de 1914-18, certes un mois seulement, mais il en était sorti totalement traumatisé. Il pense, à la fin des années trente, que les Juifs veulent régler son compte à Hitler qui ne les aime pas et qu’ils poussent donc la France à la guerre. Il faut par conséquent se mettre en travers de ces gens-là, pour éviter un nouveau conflit mondial, qui, pense-t-il, laisserait la France complètement exsangue. Céline était donc pour moi quelqu’un qui était fondamentalement antisémite et qui l’a toujours été. Après la guerre, il n’a d’ailleurs jamais manifesté le moindre regret pour ce qu’il a dit avant 1939. Tout ce qu’il a dit c’est : « J’ai eu raison trop tôt ».

A. J. : Comment l’antisémitisme de Céline transparaît-il dans son oeuvre ?
E. B. : A travers trois textes très importants. « Bagatelles pour un massacre » qui fut publié en décembre 1937 et qui est un pamphlet antisémite. Celui-ci ayant reçu un énorme succès, Céline a donc écrit l’année suivante et pour gagner de l’argent « L’école des cadavres », qui est à peu près le même genre de livre. Ce sont des ouvrages dont on peut croire éventuellement et si l’on est indulgent, qu’ils sont des livres pacifistes. Toutefois, en 1941, c’est-à-dire en pleine Occupation, Céline publia un livre intitulé « Les beaux draps ». A ce moment-là, les deux statuts des Juifs avaient déjà été publiés. Avec ce texte, toute la défense de Céline, qui consistait à dire qu’il avait été antisémite avant la guerre, tomba. Certes, « Les beaux draps » est un livre dans lequel il y a quantitativement moins d’antisémitisme que dans les autres. Mais il demeure tout autant antisémite que les deux précédents. Céline lui-même savait d’ailleurs que ce livre-là allait lui être reproché. Dans une lettre adressée à sa femme pendant son exil au Danemark, il écrit : « Les beaux draps », ma condamnation à mort ». Il savait donc qu’écrire ce livre pendant l’Occupation lui vaudrait condamnation à mort à la Libération.

A. J. : Dans quelle mesure Céline s’est-il investi dans la collaboration ?
E. M. : Céline détestait le régime de Vichy ainsi que Pétain et ce, pour une raison très simple : il trouvait que ce régime n’allait pas assez loin. Pour lui, après la défaite, la société française avait touché le fond. C’était l’occasion de la réformer complètement. En ce sens, il pensait que le régime de Vichy ne parviendrait pas à bouleverser la société française puisqu’il n’était pas un régime réformateur ou révolutionnaire. Céline appartenait à la collaboration dite radicale, c’est-à-dire qu’il souhaitait des changements beaucoup plus profonds. Cette réforme passait, entre autres, selon lui par le racisme. Il voulait en outre que les Juifs n’interviennent plus du tout dans la société française. Aussi, lorsqu’il s’est agi de trouver un commissaire aux affaires juives, son nom a été avancé. Les Allemands l’ont finalement refusé, parce qu’ils considéraient Céline comme ingérable, un peu violent et grossier. Car assez curieusement, les nazis se voulaient des espèces d’aristocrates et trouvaient Céline assez vulgaire. Céline n’a donc pas soutenu le régime de Vichy d’autant qu’à cette époque-là, il vivait à Paris, lieu de l’ultracollaboration qui souhaitait non pas le régime de Vichy mais un régime de parti unique qui aurait dirigé la France. En 1942, Céline a même essayé de fédérer autour de lui un parti unique dont l’idéologie principale aurait été le racisme. On oublie d’ailleurs trop souvent que Céline était plus raciste qu’antisémite. Il était antisémite avant la guerre parce qu’il croyait que les Juifs allaient mener la France à la guerre. Mais, lorsqu’il écrit « Rigodon », à la fin de sa vie, il est contre les Chinois. Céline se définissait lui-même comme « raciste biologique ».

A. J. : De quelle manière a-t-il exprimé ses conceptions politiques dans ses écrits ?
E. M. : Céline a écrit une quarantaine de lettres qui ont été publiées par les journaux. Sa façon de procéder était toutefois extrêmement maline. En envoyant ses lettres, il disait aux journalistes qu’il s’agissait de lettres personnelles et non pas d’articles. Il a d’ailleurs toujours refusé de se faire payer. Il précisait toutefois que s’ils décidaient de les publier, ils pouvaient le faire sous leur responsabilité et sans couper une ligne. Ainsi, sa défense après la guerre a été de dire qu’il n’avait jamais écrit un article. Certaines de ses lettres étaient tellement violentes que « Je Suis Partout », le grand journal pourtant antisémite et collaborationniste, a refusé de les publier.

A. J. : Justement, Céline a-t-il été condamné pour son antisémitisme ?
E. B. : Non, il a été condamné pour ce que l’on appelait à l’époque l’article 75, c'est-à-dire pour « intelligence avec l’ennemi ». On ne l’a jamais inquiété pour son antisémitisme. Néanmoins, Céline a eu « l’intelligence » de s’enfuir en Allemagne au moment du débarquement, en juin 1944. Il s’est fait inviter par le Reich allemand en tant que médecin et lorsque l’Allemagne s’est effondrée, il est arrivé à obtenir un laissez-passer pour le Danemark. Il est arrivé à différer son retour en France suffisamment longtemps pour ne pas être jugé de manière sévère car, s’il était resté en France, comme Brasillach, il est certain qu’il aurait été jugé et fusillé. Lorsqu’il est rentré en France en 1951, soit six ans après la fin du conflit, les passions s’étaient apaisées. Il a alors été condamné à un an de prison pour intelligence avec l’ennemi et il fut immédiatement amnistié.

Propos recueillis par Laetitia Enriquez
Actualité Juive n°1152 du 10 février 2011


Emile Brami, «Céline à rebours», Ed. Archipoche, 2011.
Commande possible sur Amazon.fr.

30 commentaires:

  1. Et vous monsieur Brami regrettez-vous d'avoir durant une bonne quinzaine d'années vendu à des tarifs prohibitifs les livres de cet odieux personnage?
    Quel beau mendiant ingrat vous faites!

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  2. Il y aurait matière à discussion sur chaque réponse. Alors juste une petite remarque :
    Céline a été condamné au titre de l'article 83.4 du code pénal, et non de l'article 75 (ça change tout : pas de peine de mort) mais cela n'intéresse que les célinomaniaques...

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  3. Emile Brami a beaucoup de merite en tant que juif de divulguer céline, tu critique... mais sans emile brami tu aurais pas le fabuleux coffret Céline vivant, et la suberbe collection celine et compagnie avec les dessins de josé correa.
    total respect pour Emile Brami...faudrait-il condamné tous les libraires d´anciens pour cause de vente des pamphlets? les pamphlets sont gratos sur internet...le probleme c´est tres chiant de lire en format PDF...les fous furieux maniaques du délire des puces stérile...faudrait faire une bonne foi pour toute caca en bonne condition..le pov céline lui meme avait du mal avec son caca et avec le caca des autres..attention aux odeurs...

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  4. Cher anonyme,
    c'est formidable Internet, ça permet à tous les péteux, tous les ratés de déverser leur bile, pour reprendre le mot d'Audiard, ça permet aux cons de tout oser. Ayez le courage de donner votre nom, avancez à visage découvert plutôt qu'en rat, dites qui vous êtes, ce que vous faites et nous comparerons qui de vous ou de moi a le mieux servit Céline. Regardez les prix des pamphlets, regardez mes catalogues si vous savez lire, au moins les chiffres, vous verrez que je les vendais au prix du marché. Vous espériez sans doute que pour faire plaisir à des gens comme vous, ceux qui aiment Céline pour de mauvaises raisons, celles qui les confortent dans leur délire de complexé minable et qui n'ont trouvé que l'antisémitisme pour se donner une vague existence, alors vous vous êtes lourdement trompé, j'aime Céline, j'ai déjà écrit que Bagatelles était un grand texte, mais cautionner l'antsémitisme et les pauvres hères qui s'en réclament, je crains que vous ne vous soyez trompé, cher et très courageux anonyme.
    Emile Brami

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  5. Te prend pas la tete Emile...il y aura toujours des jaloux, des gens malsains...moi je sais que tu fais un travail fabuleux sur l´oeuvre de céline...pour moi tu es la personne qui parle le mieux de céline,du style célinien, repondre a des cons c´est leurs donné l´espoir d´etre important...je garde des souvenirs de nos conversations sur céline dans ta librairie rue bréa...a l´epoque j´avais pas lu les pamphlets..
    ta librairie un endroit magique.

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  6. Céliniens de tous les pays, flinguez-vous !
    E C-G

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  7. Franchement monsieur Brami votre admiration pour Céline ne transparaît pas dans cette interview!

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  8. Carlos je te conseille de lire autre chose que les pamphlets;un bon dictionnaire par exemple ou un Bled.Tu en as besoin!

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  9. Conjuguer admiration et sens critique semble être une tâche insurmontable pour certains Céliniens hirsutes. Quel monde étrange...
    Les pamphlets phagocytent à ce point l'exégèse de l'oeuvre qu'il devient aberrant de vouloir engager une conversation sereine.
    Un professeur d'histoire ne me disait-il pas, avec une pointe de provocation dans le ton, alors que j'étais un collégien éleveur de puces stériles : "Vous savez, jeune homme, les cons, c'est plus dur à exterminer que les Juifs."
    E C-G

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  10. Après la guerre, Céline n’a jamais manifesté le moindre regret.
    Après sa carrière de libraire célinien, Emile Brami, non plus.
    Match nul ?

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  11. ce qui es sur c´est que j´ai pas besoin de tes conseils...anonyme..tu as honte de toi meme? moi je me cache pas derriere un pseudo...et pour mes fautes de français...faut pas m´envouloir j´ai pas fait les grandes ecoles...ça m´empeche pas de lire céline...lui meme a torturé la langue française...je detestait l´ecole...et encore maintenant je desteste l´ecole...ça va...il me manque rien...je suis pas un fanatique...il y autre chose dans ma vie que lire céline...dieu merci.sans rancune petit joueur.

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  12. Cher Thyssens,
    quels regrets devrais je exprimer? Expliquez moi. Quant à l'admiration je dis et je répète que j'admire l'écrivain mais pas l'homme.

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  13. Disons plutôt que vous admirez les livres écrits par l'écrivain !

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  14. Monsieur Brami, Monsieur Alliot,
    Cette petite soirée, organisée par la librairie Équipages, fut très conviviale. Merci à vous et aux organisateurs. Nous attendons par ailleurs avec beaucoup d'impatience de pouvoir lire Casse-pipe en intégralité.
    Je profite de cet espace d'expression pour vous poser une question. C'est un sujet que j'évoquais hier soir avec le Petiot Célinien et qu'il me semble opportun de soumettre à deux céliniens d'âges différents.
    Qu'est-ce qui subsistera de l'œuvre célinienne dans les années à venir ?
    Quelle postérité pour des ouvrages qui, à l'exception de Voyage au bout de la nuit, paraissent inintéressants ou illisibles par les nouvelles générations ?
    Je prends pour exemple la moyenne d'âge de l'auditoire présent hier soir. Céline faisait écho, naturellement. Mais dans quelques années ? A part les amateurs de style, les férus d'histoire et curieux farfelus, qui lira la trilogie allemande ?
    Regardez dans le métro...
    Céline daté, périmé ? A-t-il loupé son coup ? Ne restera-t-il que le voyage ?
    E C-G

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  15. Le problème, M. Brami, c’est qu’il est impossible de séparer l’homme de l’écrivain, l’un et l’autre se complètent. Le second ne serait rien sans le premier… Céline est à prendre tel qu’il est, dans sa passion et dans sa démesure. Le bénir d’un côté et le renier de l’autre ne change rien à l’affaire. Là se trouve nécessairement le malaise que l’on ressent à l’écoute de la plupart de vos entrevues consacrés à Céline, mais cela dit, c’est votre droit le plus strict.

    Un péteux d'Internet

    Pierre L.

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  16. Monsieur,
    je traitais de péteux l'anonyme qui s'en est pris à moi parce que son interpellation était absolument stupide et qu'elle n'avait aucun rapport avec ce que je disais, si j'avais vendu des casseroles, il aurait écrit avec le ton moralisateur et pompeux qui est le sien : "honte à vous M. Brami, honte! vous vendiez des casseroles très cher, or, vous le savez, Céline faisait bouillir l'eau de son thé dans des casseroles, est ce que cela ne vous gêne pas?". C'est aussi con que ça. Mais, vous le remarquerez qu'il n'y a pas un mot sur ce que je dis, il pouvait manifester son désaccord et argumenter, montrer en qui j'aurais tort, mais non, il n'a rien trouvé d'autre à dire.
    Pour le reste je dois mal me faire comprendre, il est évident que l'oeuvre vient de l'homme, mais je crois qu'il n'est pas nécessaire d'admirer ce dernier, il suffit de se tenir à ce qu'il écrit, je pense même qu'il est inutile au fond de le connaître,que ce qu'un artiste produit se suffit à lui même.
    Emile Brami

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  17. Vieux prof gâteux23 avril 2011 à 18:38

    A l'anonyme n°X. Il y aura toujours,demain comme hier, une petite minorité de jeunes qui liront avec plaisir ou passion des auteurs qui parlent de choses périmées. Gargantua, histoire de géants, Saint-Simon, histoires de cour et de nobles, Germinal, histoire des mineurs. Quant aux poètes, il y aura toujours un très petit nombre à aimer lire les poésies d'âââmour, pas très rock'roll... Pareil en peinture et en musique. Il y a des jeunes qui préfèrent apprendre à jouer du violoncelle que la batterie. Ils sont moins nombreux certes. Cranach peut encore plaire à certains jeunes, ceux qui font l'effort d'aller dans un musée. Il en sera de même pour Céline. Il ne sera pas autant lu que Harry Potter, Le Seigneur des anneaux, les mangas, et n'a jamais concurrencé Delly ou San Antonio. Le même problème se pose avec les grands écrivains, ceux qui apportent vraiment quelque chose de nouveau, qui casse le mur de la mode - qui se démodera elle aussi encore plus vite. Ce qu'il faut, c'est que les vieux comme nous donnent leur chance aux jeunes d'aller écouter du Shakespeare ou du Céline, du Racine ou du Rostand. Tout vieux prof de lycée le sait quand il sort une classe au théâtre. Sur trente élèves, trois seront touchés par la grâce. Les autres auront regardé leur voisine ou joué avec leur portable. Vous croyez que Villon ou Rimbaud sont accessibles à toute une classe, Lautréamont, Michaux ? Sur trente élèves, vingt-cinq rigolent, n'écoutent pas, lisent leurs SMS. Alors... Céline en 2011 a déjà plus de lecteurs qu'en 1951. Nord se vend plus en 2011 qu'en 1960. Et pas seulement lus par les gens qui ont connu la guerre. J'étais pas né en 44, je suis étrangers aux histoires de la collaboration, et je lis ces vieilles histoires avec plaisir. Pourquoi ? Parce qu'elles sont mieux racontées par lui que par d'autres écrivains emmerdants. Parce qu'on entend une voix. Parce que ces histoires racontées par Céline renvoient à une autre dimension. Parce que ce ne sont pas de simples histoires. Autant Peyrefitte est emmerdant avec ses Juifs, autant Céline est génial avec ses Bagatelles à cause de ses outrances, de son délire horrible.Mais on est en droit de ne pas aimer les films d'horreur et de préférer les films romantiques. Casse-pipe est un livre de science-fiction et non un reportage sur le service militaire. Il y a des jeunes qui aiment la science fiction de Casse-Pipe. Le nombre ne fait pas le poids. La qualité est toujours moindre que la quantité. La majorité se précipite sur Mc Do. Mais il y aura toujours des amateurs de bons plats. Question de goût naturel ou d'éducation.

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  18. Bien vu et bien dit, Vieux prof loin d'être gâteux ! la littérature lorsque' elle atteint au sublime, au grandiose ou à l'essence (pas celle que l'on vend chez Total) est intemporelle, tout comme sa soeur jumelle, la philosophie. Elle se contrefiche des siècles et des millénaires : ne lit-on pas toujours Platon, Aristote ou Aristophane ? "Céline en 2011 a déjà plus de lecteurs en qu'en 1951". Tant mieux ! Simple hommage du Temps au génie créateur.

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  19. Monsieur le professeur,
    Tout d'abord, je vous remercie d'avoir pris le temps de répondre à mon petit questionnement. Nous partageons le même avis, n'en doutez pas. C'est d'ailleurs un enseignant qui m'a fait connaitre l'oeuvre de Céline, par le biais de Voyage au bout de la nuit. Je devais avoir 15 ou 16 ans, j'en compte 37 à présent.
    Je crois aussi, à votre image, que la qualité prime sur la quantité. Je m'interroge seulement sur la pérennité d'une œuvre qui, à l'exception de Voyage, n'intéressera qu'une élite, rompue à l'exercice de la langue et aux événements du siècle dernier.
    Il y aurait donc un Céline populaire - universel ? - et un Céline aristocrate, beaucoup plus confidentiel ?
    Pensez-vous que le rendu émotif, le métro, la petite musique et tout le reste, vous savez, ce qui est censé toucher directement le nerf, puissent véritablement atteindre l'objectif dans de telles conditions ? Juste le style, sans les idées ?
    Je crois que Maurice Bardèche avait quelque-peu raison de l'évoquer dans sa biographie consacrée à Céline.
    J'ai coutume de dire que Céline est l'homme de ma vie. Je suis certainement assez déraisonnable comme garçon. Mais j'estime aussi nécessaire d'avoir un peu recul, à la fois sur l'homme et sur l'œuvre. Naturellement, mon avis ne vaut pas tripette face aux céliniens assidus ou professionnels. Comme disais l'autre, avant d'être de retour du mauvais côté de la vie, je suis un homme sans importance collective.
    Mais la question mérite, à mon sens, d'être posée. J'en discutais avec le Petiot Célinien. Évoquer Céline, c'est parler de Voyage et des écrits polémiques, en éludant le reste qui ne semble pas avoir existé.
    J'en conviens avec vous. A nous de faire découvrir le reste, conséquent, de l'oeuvre. Avec passion et pédagogie. Mais n'est-ce pas là un aveu d'échec ?
    Pour info, je ne suis pas plus anonyme que vous, mes initiales étant systématiquement à la fin de mes petites impressions. Je suis, par contre, plus jeune que vous... et fort gourmand de l'œuvre de l'idole des plus de 50 ans.
    Cordialement.
    E C-G

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  20. Allez plutot chez MC DO au lieu de lire des livres sans interet,céline pour moi ne represente que haine et racisme,il y a encore deux jours j´ai balancé a la poubelle le voyage au bout de la nuit,desolé j´acccroche pas votre passion,céline est ilisible.

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  21. Turlututu chapeau pointu23 avril 2011 à 22:04

    Chacun son cochon de goût comme on dit en Bretaigne. Mais quel masochisme que de fréquenter des lieux détestés ! Ma grand-mère trouvait Céline illisible, grossier, méchant, elle préférait Lamartine. Bon, elle n'avait pas lu Rabelais ou Genêt. Lamartine, c'est très bien. Pourquoi l'aurais-je blâmé de ne pas aimer Céline ? Mister Love, si vous n'aimez pas fréquenter les bals musettes, promenez vous sur les grands boulevards au grand air, ou sortez en boîte de nuit. Pourquoi vous faire tant de mal ? vous imposer telle torture ? Personne ne vous y oblige ! C'est de la haine bien macérée que de rentrer en un lieu qu'on déteste d'avance pour siffler la pièce et engueuler les spectateurs. Il y a mieux à faire. Fréquentez les lieux qui vous apportent joie et bonheur !

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  22. Vieux prof gâteux23 avril 2011 à 22:18

    E C G Vous croyez qu'à seize ans en première je savais qui était les jésuites, ce qu'ils représentaient, avaient fait, et que j'aurais aimé Candide tout seul si un bon prof ne m'avait expliqué les enjeux du conte ? vous croyez que j'aurais aimé Racine si on ne m'avait fait d'abord aimé l'alexandrin ? que j'auras admiré Ingres ou Picasso si on ne m'avait révélé les difficultés ou les prouesses du dessin ? Un ado peut évidement avoir un coup de foudre pour La Flute enchantée sans avoir étudié le solfège ou la Petite musique de nuit. Mais c'est tout de même assez rare. Pareil pour Céline. Il y a ceux qui y rentrent d'emblée, sans notules, notices, préface, etc... et ce sont de bienheureux. Il y en a d'autres qui doivent apprendre le mécanisme avant de l'entendre ronfler dans leur tête. Chacun sa lecture, quand l'oeuvre est riche. Pas besoin de savoir su Quasimodo a eu un modèle pour aimer Notre Dame. Idem pour le personnage de Bichelonne. C'est ce qu'il représente qui compte et amuse.

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  23. Turlututu chapeau pointu23 avril 2011 à 22:31

    Monsieur Love, j'ai toujours détesté les skean heads qui, au lieu de défouler leur agressivité ou leur gout du combat dans un sport ou dans un combat utile (quelqu'il soit), s'acharnent sur des tombes chéries par d'autres. Ne faites pas comme eux ! S'acharner sur la tombe de Céline, quel mérite ? quel plaisir ? quel exploit ? Il y a tant de champs à cultiver au lieu de cracher sur les tombes !

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  24. Cher J.B.LOVE,

    Avez-vous balancé le Voyage à la poubelle (de chez MC DO) parce que l'auteur "n'est que haine et racisme", ou parce qu'il est "illisible" ?
    Ou plutôt : n'est-il, à vos yeux, illisible que parce qu'il n'est "que haine et racisme", quoi qu'il ait pu écrire par ailleurs ? Ce qui dans ce dernier cas ne relève plus du jugement littéraire : son racisme et son antisémitisme discrédite alors l'ensemble de son oeuvre. Maintenant, si Céline n'avait pas été raciste et antisémite (ou seulement dans le secret de sa chambre à coucher), serait-il acceptable et, donc, lisible pour vous ?

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  25. Je suis pas skean head...turlututu..j´arrive pas a lire céline c´est tout,je le trouve illisible car trop argotique et français populaire,une langue morte,et puis il faut lire la pléiade pour les dates et personnages,trop compliqué pour moi,je suis de la generation MCDO
    j´ecoute pas le prof,je lis mes sms...hehehehe!
    la seule admiration que j´ai pour céline c´est qu´il a ecrit ce qu´il voulait,moins lache que certains ecrivains,Denoel la payer de sa vie...
    Mr Razu le racisme de céline me gene pas a l´epoque c´etait comme ça...la guerre,la haine,la misére,c´etait le quotidien de la France...meme la trilogie de la guerre j´y arrive pas,pourtant j´aime l´histoire,céline fait trop de cinema,pour moi il en fait toujours trop pour pas le croire... beaucoup de gens rigole avec les pamphlets,c´est trop abusé...ça marche pas,céline n´est meme pas antisemite,c´est son cinema qui est antisémite.
    céline accroche le lecteur par son style agressif
    mais il raconte rien...il tourne autour avec un style repetitif argotique,trois petit point...
    Pour réussir dans la litterature céline a oublier
    d´etre academique...en fait d´etre comme les autres.

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  26. Monsieur le professeur,
    Cette page va bientôt se fermer, chassée par d'autres moments d'une actualité célinienne forcément riche. Profitons de cette petite agonie pour essayer, avant d'être enterrés, de dire encore deux ou trois légèretés.
    A n'en pas douter, vos remarques sont pleines de bon sens. Richement illustrées, démonstratives - quelle pédagogie ! -, elles ont le mérite d'être absolument didactiques. Comme vous êtes un expert en accouchement, je suis devenu un élève comblé.
    Je reste néanmoins très attaché à la notion de voyage, premières et secondes classes confondues, d'un même élan, d'un même entrain... jusqu'au bout d'une même nuit. Je m'intéresse plus au lot commun qu'aux petits tracas individuels, ces perfidies. Parce qu'ils renvoient à d'autres chichis personnels, individuels... à d'autres vanités.
    Ne reste alors que le style, vecteur d'imaginaire et d'émotions. Pour s'oublier un peu, ou du moins faire semblant, comme si. Mais quels trésors !
    E C-G

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  27. Mais justement, si Céline avait été académique et comme les autres quel serait son intérêt ? Il suinterait de son oeuvre un ennui périssable qui l'aurait condamné très vite à un oubli parfaitement mérité, comme des dizaines de ses contemporains de lettres mais auteurs "à succès" en leur petit temps (vous voyez, la génération "MC DO" ne date pas d'aujourd'hui : à l'époque, c'était génération Prisunic et midinettes). Et ce n'est pas une question de réussite : "Mort à crédit" a été un échec en 1936. Céline, ulcéré, en abandonne la rédaction de "Guignol's band" (il ne la reprendra q'en 1943) pour se lancer dans les pamphlets, avec le calamiteux "succès" que l'on sait qui entache encore aujourd'hui son oeuvre. On ne bouscule pas impunément l'ordre académique établi, en art en général et en littérature en particulier : on se heurte alors à l'incompréhension et au rejet de ses contemporains. Certains, parmi les plus grands, l'ont payé de leur vie, de leur liberté ou de leur raison : Nerval, Lautréamont, Jarry, Sade, Artaud, Vaché, Cravan...tous suicidés, fous ou embastillés. Voilà ce qu'il peut en coûter de défier le "bien écrire" de son temps.

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  28. Vieux prof gâteux25 avril 2011 à 15:24

    A ECG: Vous avez, un prof, ça sème sans savoir ce que ses paroles deviendront. Un souvenir parmi beaucoup d'autres. Dix ans après avoir enseigné pour le bac la première partie de Voyage en première ES (en lycée de banlieue pour enfants à problèmes), j'ai reçu une lettre d'un ancien élève, devenu diplômé en sciences économiques internationales. Un Tunisien (juif ou musulman, je ne sais, et qu'importe!) qui me remerciait de lui avoir fait découvrir Céline. Stupeur et joie et fierté. Revanche sur les autres profs de mon lycée qui médisaient de mon programme (on avait alors liberté de choix...) Cet élève n'avait pas dit un mot de l'année... Un autre souvenir: un élève de 4e qui dans son dossier de lecture de Casse-Pipe avait écrit qu'il avait lu ce livre comme un livre de science fiction : "hommes-animaux", "langage d'extra terrestres", "planète hostile", etc... Sur le cul que j'étais ! Céline n'appartient pas aux universitaires, aux fins lettrés, à une classe de bobos. Loin de là ! Sa langue, quoiqu'en dise Mr Love, est plus vivante aujourd'hui que celle des ténors de son temps ou de ceux d'aujourd'hui. Question de sensibilité, d'émotion, de réceptivité.

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  29. Si Céline a été le salaud que certains disent, il n'y a pas que les Juifs qui auraient du mérite à apprécier Céline, mais tous les Français car tous les Français ont souffert d'Hitler, ou leurs parents (à part une poignée de profiteurs). Eux aussi pourraient écrire ou dire : "Bien que Français" j'ai du plaisir à lire Céline. Ou bien encore plus paradoxal ou commercial : "Bien que fils de résistant, j'ai du plaisir à lire Céline". "Bien que fils d'assassiné par Hitler et ses sbires, j'ai plaisir à lire Céline".

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  30. Monsieur le professeur,
    Je suis ravi d'avoir pu converser aimablement, sans vociférations et autres anathèmes. Et de l'œuvre plutôt que du bonhomme, sans pour autant négliger l'importance de sa personnalité dans le processus créatif. Au moins, nous aurons évité les déflagrations habituelles, trop souvent liées à des vues idéologiques contraires et parasitaires.
    Je trouve ainsi que Le Petiot Célinien joue son rôle et permet, somme toute, quelques moments sympathiques, élégants.
    Cette petite parenthèse montre également que les ténors de la Célinie s'intéressent particulièrement aux péteux du net qui les titillent personnellement. Quant au reliquat...
    Au plaisir de vous lire.
    E C-G

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