vendredi 19 août 2011

L'hommage à Zola de Céline : La presse en fait ses choux gras

La presse se tient en éveil dès avant son apparition publique à Médan. Ainsi dans le Paris-Midi du 1er octobre (2) on peut lire : « L'attrait, si l'on peut dire, du pèlerinage qui aura lieu dimanche après-midi, à Médan, pour le 31ème anniversaire de la mort d'Emile Zola, sera sans doute dans le discours que prononcera Louis-Ferdinand Céline, l'auteur du Voyage au bout de la nuit, qui eut “presque” le prix Goncourt, à la fin de l'an passé. » « Monsieur Céline a fait peu parler de lui, laissant à son livre le soin de répandre son nom à cent mille exemplaires », poursuit le journaliste de Paris-Midi. « Il a repris son poste au dispensaire où il soigne les malades, et c'est seulement ces jours derniers qu'il a fait paraître une pièce non jouée dont le titre - L'Eglise (3) - s'applique à la Société des Nations qu'il connaît dans les coins pour avoir participé modestement, mais activement, à ses travaux. »
La Dépêche de l'Ouest rapporte aussi cette journée à Médan : « Dimanche, comme un soleil léger annonçait un bel après-midi, nous nous sommes rendus à Médan, où avait lieu la réunion annuelle des Amis de Zola. Les fidèles étaient nombreux, plus nombreux peut-être que d'habitude, car M. Céline, l'auteur célèbre du Voyage au bout de la nuit et de l'Eglise devait prendre part à la cérémonie. (...) De ce jardin d'où la vue s'étend sur les collines de l'Hautil, Triel, Meulan, le bassin de la Seine, à travers un océan de ramures à peine touché par octobre, et où se marquait seulement l'approche de l'automne à la décoration délicate des verdures, face à un horizon comme on n'en voit que dans l'Ile-de-France, à la fois lumineux et voilé, M. Céline a parlé en effet, sinon de Zola du moins de lui-même. » (4)
C'est sans doute au journaliste de Charivari que l'on doit la description la plus savoureuse de cette journée où tout le gratin littéraire de l'époque communie chez les Leblond-Zola : « Rien de plus comique que la foule d'environ cinq cents personnes qui se pressait à Médan dimanche dernier pour fêter Zola. (...) Public étrange. De vieux esthètes, familiers des réunions de l'Union pour la vérité, d'anciens dreyfusards qui frémissent encore au seul énoncé des avatars du capitaine, petits bourgeois friands de scandale qui s'attendaient à voir Céline écumant et vitupérant et se promettaient de ne point manquer le spectacle, fonctionnaires enfin, sages fonctionnaires, qui sont de toutes les inaugurations (...) On banqueta d'abord dans un médiocre café du lieu et le banquet qui réunit un groupe hétéroclite de gens de lettres fut aussi bizarre que le public. “On a bien mangé mais on a mal bu", disait en sortant, Louis-Ferdinand Céline. » (5)

Le Courrier des Yvelines, 17 août 2011.

Photo : Photo paru dans L'Intransigeant du 3 octobre 1933.


Notes
(2) Max Descaves, “Dimanche à Médan, L.-F. Céline fera l'oraison funèbre d'une société agonisante à l'occasion de l'anniversaire de Zola”, Paris-Midi, 28 septembre 1933.
(3) On a coutume de dire que L'Eglise est l'embryon du Voyage au bout de la nuit.
(4) “Un pèlerinage à Médan”, La Dépêche de l'Ouest (Brest), 3 octobre 1933.
(5) “Quand on fête Zola”, Le Charivari, 7 octobre 1933.

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