Pauldel.blog.lemonde.fr, 8/10/2009 : Dans la grande série les lettres inédites de Céline, je ne résiste pas au plaisir de citer cette carte postale de Leningrad, envoyée par L.F. Céline le 4 septembre 1936 à ses amis Gen Paul et à Jean Bonvilliers et qui en dit long sur sa manière de juger l’URSS :
Merde ! Si c’est ça l’avenir, il faut bien jouir de notre crasseuse solitude. Quelle horreur ! Mes pauvres amis ! La vie à Gonesse prend une espèce de charme en comparaison! Bien amicalement à vous deux.
La lettre à son ami Eugène Dabit rédigée le 5 octobre 1933 annonce aussi un thème souvent repris par Celine : la littérature devenue anachronique. Il l’expliquera longuement dans les Entretiens avec le professeur Y. N’oublions pas que le Céline qui écrit cette lettre à Dabit (auteur de Hôtel du nord est encore tout enduit de sa célébrité nouvelle et polémique. Un an auparavant, son premier roman Voyage au bout de la nuit en 1932 l‘a rendu célèbre, lui médecin de banlieue inconnu du public.. Ayant raté le Goncourt dont il était le favori, (mal) consolé par un prix Renaudot, mais acclamé par une partie de la critique et surtout, ayant eu une presse énorme, et immédiatement des contrats pour des traductions (Elsa triolet et Aragon ont proposé une version expurgée du livre aux soviétiques pour orienter le roman vers une seule analyse de la décomposition de la société bourgeoise française..) Voici donc l’extrait de la lettre à Dabit :
D’abord notre littérature mon vieux n’existe plus.C’est une archéologie. Dimanche pour faire plaisir à Descaves (Lucien Descaves, juré au prix Goncourt qui défendit ardemment Voyage) j’ai dû aller bavarder sur Zola à Médan. Ces occasions me sont toujours odieuses. Mais j’ai eu l’impression consolante-l’absolution que la littérature ne signifiait plus rien dans la vie d’aujourd’hui- La vie ne passe plus par elle. C’est une ancienne capitale-comme Dijon- abandonnée aux retraités à renvois... aux automobilistes de troisième main- aux chats amputés... la vie ne passe plus par là-la TSF le cinéma- détiennent ces friperies-C’est fini mon vieux-A nous la casquette des gardiens de musée... Je vous ai envoyé L’Eglise à Paris.
à bientôt mon vieux.
L. Destouches
Photo : Céline à Médan le 1er octobre 1933.
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