vendredi 19 juin 2009

Louis-Ferdinand Céline - Nicolas Sarkozy

Longtemps, le chef de l'Etat n'a évoqué qu'un seul grand écrivain : Louis-Ferdinand Céline. Pas le moins sulfureux...

"On peut aimer Céline sans être antisémite, comme on peut aimer Proust sans être homosexuel !" glissait Nicolas Sarkozy à propos de Céline, son "écrivain préféré", à quelques journalistes qui l'accompagnaient en Inde, en 2008. Une sentence ferme visant à justifier son goût pour un auteur qui, il le sait, sent le soufre. Un goût plutôt courageux pour un président - on se souvient que Pompidou préférait réciter du Saint-John Perse, Valéry Giscard d'Estaing relire Maupassant et François Mitterrand se perdre dans les méandres de Chardonne...

En 1996, déjà, Sarkozy confiait à L'Officiel Hommes : "Tenez, prenez Céline. Voilà un homme qui n'était qu'un médiocre médecin de banlieue. Un jour, il écrit Voyage au bout de la nuit. Cela me fascine ! Cette action qui consiste à donner plus, ce ressort qui vous pousse à vous surpasser, à créer et agir par passion. Tout est là !" Toute ressemblance avec...

Mais le président, à qui ses collaborateurs ont offert un autographe de l'écrivain pour son 53e anniversaire, en janvier 2008, ne se contente pas de célébrer les mérites du trop fameux Voyage. Plus audacieux, il lui est aussi arrivé de confesser son penchant pour Nord, un roman paru en 1960 et considéré par les céliniens comme le sommet de l'oeuvre avec D'un château l'autre. Un penchant politiquement très incorrect, car, entre Voyage et Nord, Céline a signé des pamphlets antisémites (dont Bagatelles pour un massacre) et s'est réfugié dans l'Allemagne nazie à la fin de la guerre. Et Nord contient nombre de passages où affleure, sous une plume géniale, un racisme à peine voilé.

Il est une autre personne à revendiquer de longue date son amour pour Céline : Carla Bruni. Avant de rencontrer son futur époux, elle avait même demandé à un ami écrivain de la présenter à Lucette Destouches, l'épouse de l'écrivain qui, à 96 ans, vit toujours dans la maison de Meudon où le romancier a fini sa vie, en 1961. Carla est donc "montée" route des Gardes, pour un mémorable moment. "A la fin, Lucette et Carla sont tombées dans les bras l'une de l'autre", se souvient un convive.

Mais pourquoi lui et pas un autre ? Il est une phrase du romancier maudit que Nicolas Sarkozy cite régulièrement : "Le style, c'est final." Elle permet peut-être de deviner ce qui attire tant le président chez l'auteur de Voyage : une méfiance viscérale envers les grandes idées générales et une célébration du "style" personnel. Tous deux se sont sentis des parias par rapport à leur milieu, l'un pour antisémitisme, l'autre pour "balladurisme" (c'est moins grave...). L'un a vécu l'exil au Danemark, l'autre une traversée du désert en Chiraquie. L'orgueilleux Céline s'était fixé pour but de rendre tous les autres écrivains contemporains "illisibles". Un peu comme Nicolas Sarkozy avec ses concurrents politiques ?

Jérôme DUPUIS
L'Express, 18 juin 2009

9 commentaires:

  1. rapprochement totalement inepte. Que ne faut-il pas écrire pour vendre son journal.

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  2. Article effectivement fort médiocre...
    Ne pas lire les derniers romans "car, entre Voyage et Nord, Céline a signé des pamphlets antisémites"... d'une bêtise...

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  3. Article grotesque !! et puis l'argument : "On peut aimer Céline sans être antisémite, comme on peut aimer Proust sans être homosexuel !" est réelement stupide.
    De plus la "méfiance viscérale" de sarkozy envers " les grandes idées générales" , c'est à mourrir de rire, Sarko en est le plus pitoyable des chantres. Il ferait mieux de relire les page de Céline concernant la publicité, et la dérive des médias, dont il se sert et s'est servi pour en arriver ou il en est. Céline aurait sans aucun doute buriner un portarait de ce cher président d'une violente drolerie. Et que dire de cette précieuse Carla...

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  4. De plus, il est certain qu'il s'agit de la part de sarko d'une posture médiatique, et qu'il n'a probablement lu de Céline que les notes de synthèse transmises par ses sbires. De même qu'il cite Malaparte et "la peau" mais se révèle incapable d'en dire autre chose que les lieux communs des fiches de lecture du bac français. De même quand il parle de Céline.

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  5. Incroyable niaiserie voulant hisser le Nabo hongrois vers les grands.

    Céline l'aurait crucifié avec sa plume et sa verve,...

    Si sarko a lu Bagatelles, il devrait le relire, sans cocaïne dans le pif, il finirait sans doute par s'y voir comme dans un miroir...

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  6. Quelquefois, on peut être fasciné par son contraire : c'est peut-être le cas de M. Sarkosy, car je ne vois pas ce qui pourrait rapprocher les deux hommes.

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  7. Lire Céline, et en admirer le style, c'est une chose. En comprendre le sens, la "substantifique moelle", en discerner la pensée pour mieux, l'apprécier, la savourer, comme on savourerait un grand cru classé en est une autre.
    Je doute fortement que Sarkozy en soit capable.

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  8. Il est intéressant de relire ceci à l'aune du débat sur la célébration (ou pas) du cinquantième anniversaire de la mort de Céline.
    La phrase de Nicolas Sarkozy mettant en parallèle l'antisémitisme de Céline et l'homosexualité de Proust est proprement scandaleuse.

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  9. Incroyable raccourci d'un journaliste en mal de sensations, qui nomme "Bagatelles" comme pour dire : "Voyez cet homme qui a comparé la Shoah à une bagatelle !...". Faut vraiment pas s'être penché sur Céline pour baver des allusions aussi manipulatrices et historiquement erronées.

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